Dans certains cas, l’effet placebo peut biaiser l’effet d’un traitement. La question est de savoir comment quantifier quelle part de notre réponse à un traitement est due à l’effet placebo. La synthèse des données probantes et la méta-analyse en réseau offrent une occasion unique d’étudier ce phénomène. Anna Chaimani, chercheuse au Centre de Recherche en Épidémiologie et Statistiques (Université Paris Cité – Inserm) et Adriani Nikolakopoulou, chercheuse post-doctorale à l’Institut de Biométrie médicale et de statistique de l’Université de Fribourg, en Allemagne travaillent ensemble sur cette méthodologie. Découvrez leurs travaux de recherche.

© Anna Chaimani (à gauche) et Adriani Nikolakopoulou (à droite)

Dans le cadre du programme international chercheurs invités et invitants, la chercheuse Anna Chaimani accueille sa collègue Adriani Nikolakopoulou durant 1 mois. Leur rencontre date de la période de leurs études doctorales à l’Université d’Ioannina en Grèce qui dispose d’un laboratoire de recherche unique en son genre, spécialisé dans la synthèse des données probantes et la méta-analyse en réseau. Parce que leurs idées et travaux sont complémentaires, Adriani Nikolakopoulou a répondu positivement et avec enthousiasme à l’invitation d’Anna Chaimani de rejoindre Université Paris Cité pour 1 mois. Ce séjour est une véritable opportunité de travailler ensemble sur le projet de bourse post-doctorale d’Adriani Nikolakopoulou qui étudie le rôle de l’effet placebo dans la synthèse des données probantes.

 

Collecter toutes les informations relatives à une question de recherche

La synthèse des données probantes, « Evidence synthesis », est un moyen de collecter et combiner toutes les données provenant de plusieurs études qui ont porté sur la même problématique, afin de parvenir à une compréhension globale de leurs résultats, et de faire une synthèse de l’ensemble des données. Ces dernières sont généralement extraites d’essais contrôlés randomisés et d’études observationnelles. La synthèse des données probantes aide à déterminer l’efficacité relative de certaines interventions ou de certains médicaments, ainsi que les sous-groupes potentiels de populations pour lesquels le traitement fonctionne le mieux.

En appui à la synthèse des données probantes, la méta-analyse en réseau est une technique statistique permettant de comparer trois interventions ou plus simultanément dans une seule analyse en combinant les données probantes directes et indirectes d’un réseau d’études. La méta-analyse en réseau produit des estimations des effets relatifs entre n’importe quelle paire d’interventions dans le réseau, et donne généralement des estimations plus précises qu’une seule estimation directe ou indirecte. Elle permet également la dérivation de la hiérarchie des interventions.

« Nous essayons de rassembler un ensemble d’études suffisamment homogènes pour être synthétisées. Dans une méta-analyse en réseau, nous ne recueillons pas seulement des données provenant d’études qui comparent les mêmes paires d’interventions de soins de santé, mais nous construisons ce que nous appelons un réseau d’interventions. La majeure partie de notre travail est d’ordre méthodologique, ce qui signifie que nous développons de nouvelles méthodologies dans le domaine de la synthèse des données probantes et de la méta-analyse en réseau, tandis que l’autre partie relève du travail appliqué » explique Anna Chaimani.

 

De la clinique à la synthèse de données probantes

Les chercheuses travaillent régulièrement sur des questions de recherche clinique comme par exemple, avec des psychiatres dans le but de définir le traitement optimal de la dépression, parmi une série d’alternatives. Après avoir préparé un protocole pour l’ensemble du processus, leurs collaborateurs cliniques collectent les études et extraient les données, sur lesquelles les chercheuses procèdent aux analyses statistiques et l’ensemble de l’équipe interprète ensuite les résultats. En parallèle, les chercheuses développent de nouvelles méthodes, qu’elles testent à l’aide d’études de simulation, afin de trouver les moyens les plus appropriés d’analyser les données probantes.

« Ce qui est bien dans ce domaine, c’est qu’il doit être interdisciplinaire. De nombreux chercheurs travaillent sur le même projet, mais sous un angle différent » selon Adriani Nikolakopoulou. « L’avantage de construire des méthodes c’est qu’elles peuvent être utilisées pour n’importe quelle condition et ne sont pas limitées à un domaine spécifique » ajoute Anna Chaimani.

 

Les prochaines étapes

Au cours de l’année prochaine, Anna Chaimani et Adriani Nikolakopoulou travailleront sur leur projet commun qui leur permettra d’obtenir des résultats fiables. Elles préparent également plusieurs publications conjointes de dans revues à comité de lecture. Adriani Nikolakopoulou a reçu une importante bourse à Fribourg pour les six prochaines années pour laquelle Anna participe, ce qui signifie qu’elles continueront à travailler ensemble sur d’autres projets et à renforcer leurs collaborations.

« Nous allons étudier l’effet placebo qui intéresse de nombreux chercheurs depuis les années 1950. La question est de savoir comment quantifier quelle part de notre réponse à un traitement est due à l’effet placebo. Dans certains cas, cet effet peut biaiser l’effet du traitement. Le but est de comprendre dans quelle situation nous devons être conscients de l’effet placebo. L’objectif final est de corriger et d’ajuster l’effet de traitement biaisé afin qu’il puisse être utilisé pour la prise de décision clinique par les professionnels de la santé et la société médicale » précise Adriani Nikolakopoulou. 

« Nous tenons à remercier Université Paris Cité pour cette opportunité de visite, sans ce financement, il n’aurait pas été possible pour Adriani Nikolakopoulou de venir pendant un mois à Paris » déclare Anna Chaimani.

 

 

Master Santé publique – Parcours : recherche comparative de l’efficacité – Anna Chaimani est également membre de l’équipe enseignante et fait partie d’une équipe d’enseignantes et enseignants européens de renommée internationale dans le programme du Master Santé publique – Parcours : recherche comparative de l’efficacité à Paris, dispensé entièrement en anglais. « C’est un cursus de master intéressant, assez intense, qui attire des étudiants internationaux. Le premier semestre est uniquement composé de cours, tandis que le second semestre est un stage. Chaque semaine, il y a différents modules. Je suis responsable de deux modules : méta-analyse avancée et méta-analyse en réseau. La méthode d’enseignement est très interactive. Certains des étudiants restent dans le laboratoire, ce qui est bien, car ce master peut permettre d’avoir de nouveaux collègues », explique Anna Chaimani. Pendant son séjour à Paris, Adriani Nikolakopoulou aura l’occasion de superviser les étudiants qui effectuent leur stage dans le cadre du programme de ce Master.

 

Anna Chaimani est chercheuse senior au Centre de recherche en épidémiologie et statistique  (Inserm, Université Paris Cité). Elle a étudié les mathématiques, et a obtenu un master en sciences en biostatistique à l’Université d’Athènes en 2011 et en 2014, elle a obtenu son doctorat en épidémiologie à la faculté de médecine de l’Université d’Ioannina, en Grèce. Ses intérêts de recherche portent sur la méthodologie et le développement de logiciels pour la synthèse des données probantes, avec un accent particulier sur la méta-analyse en réseau. Elle est responsable de l’équipe de synthèse des données probantes du Centre de recherche en épidémiologie et statistique (CRESS) et enseigne dans le programme du Master Santé publique – Parcours : recherche comparative de l’efficacité. Actuellement, elle travaille au développement de nouvelles méthodes de classement des interventions, de méta-analyse en réseau de données éparses et de modèles de synthèse d’études hétérogènes.
Adriani Nikolakopoulou est chercheuse post-doctorale à l’Institut de biométrie médicale et de statistique de l’Université de Fribourg, en Allemagne. Elle a étudié les mathématiques appliquées à l’Université technique nationale d’Athènes, en Grèce, et les biostatistiques à l’Université d’Athènes, en Grèce. Elle a travaillé comme chercheuse à l’université d’Ioannina, en Grèce et a obtenu un doctorat en biostatistique à l’Institut de médecine sociale et préventive (ISPM) de l’université de Berne, en Suisse. Ses recherches sont axées sur le développement d’une méthodologie pour la synthèse des données probantes. Elle a publié articles évalués par des pairs dans des revues méthodologiques, épidémiologiques et cliniques et a contribué à deux chapitres de livres. Grâce à une bourse de recherche du Fonds national.

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