Je m’appelle Florence DEHU, je travaille actuellement en cabinet et je suis aussi attachée hospitalo-universitaire à l’hôpital Louis Mourier en tant que référente pour les personnes en situation de handicap. Ma thèse porte sur les différences de prévention primaire entre les sportifs de haut niveau valides, ceux en situation de handicap physique et ceux en situation de handicap mental.
La prévention primaire vise à éviter de contracter des maladies bucco-dentaires. Cela concerne l’hygiène dentaire, l’alimentation et la prévention des traumatismes sportifs, par exemple, via les protection intra-buccale. Les sportifs de haut niveau sont inscrits sur une liste ministérielle et bénéficient d’un statut particulier qui leur permet de participer à des compétitions nationales et internationales. Pour être inscrits sur cette liste, ils doivent être sous surveillance médical réglementaire, qui inclut un suivi dentaire.
Les sportifs de haut niveau font partie de fédérations sportives spécifiques. Pour les personnes valides, chaque sport a sa propre fédération. Pour les personnes en situation de handicap physique, il existe la Fédération Française Handisport, qui regroupe différents sports. Pour les sportifs avec un handicap mental, c’est la Fédération Française de Sport Adapté qui est compétente. Ces fédérations veillent au bon déroulement de la surveillance médical réglementaire.
Comment la prévention dentaire peut-elle contribuer à améliorer les performances sportives ?
Les sportifs sont une population à risque pour les problèmes dentaires. Leur alimentation, souvent riche en glucide avec des collations sucrées et acides, augmente le risque carieux ou d’apparition de carie. La respiration buccale, fréquente chez les sportifs, provoque une sécheresse de la bouche, réduisant ainsi la protection naturelle offerte par la salive. De plus, ils sont souvent soumis à des traumatismes dentaires, surtout dans les sports de combat et de contact.
Les infections buccales, même mineures, peuvent avoir des répercussions sur l’ensemble du corps. Une infection dentaire peut entraîner une augmentation des médiateurs de l’inflammation dans le sang, retardant la cicatrisation des blessures et entretenant des tendinites. Par ailleurs, un déséquilibre occlusal dû à la perte de dents peut entraîner des déséquilibres dans la contraction musculaire, réduisant ainsi la performance sportive.
Quelles sont les principales barrières auxquelles sont confrontés les sportifs ?
Dans le cadre de ma thèse, j’ai comparé le suivi médical réglementaire des sportifs de haut niveau valides à celui des sportifs en situation de handicap. À l’INSEP, les sportifs bénéficient d’un suivi dentaire complet avec un dentiste dédié, des fiches d’informations détaillées et des fiches de prévention disponibles.
En revanche, pour les sportifs en situation de handicap physique, il n’y a pas de dentiste référent au sein de leur fédération. Ils doivent trouver eux-mêmes un dentiste, dont l’observation est souvent moins complète que celle de l’INSEP. Pour les sportifs en situation de handicap mental, l’accès aux soins est encore plus problématique en raison de l’accessibilité des lieux et du manque de dentistes formés à leur prise en charge.
Comment l’éducation et la sensibilisation diffèrent-elles et quelles adaptations sont nécessaires ?
Les sportifs de haut niveau valides ont un accès facile aux soins et à la prévention. Pour les sportifs en situation de handicap physique, c’est à eux de trouver un dentiste spécialisé dans le sport. Les sportifs avec un handicap mental ont très peu d’accès aux soins et à la prévention.
Il serait bénéfique d’avoir des dentistes dans les pôles et fédérations pour les personnes en situation de handicap, ou au moins des stands de prévention. Pour les personnes avec un handicap mental, il est important d’adapter le discours pour qu’il soit compréhensible et d’être plus patient. Dans ma thèse, j’ai créé une fiche de prévention en FALC (Facile à Lire et à Comprendre) pour qu’elle soit accessible aux personnes avec un handicap mental.
Je suis en contact avec l’UFSBD pour les mettre en relation avec les fédérations sportives afin qu’ils puissent travailler ensemble. Il serait utile de créer un annuaire regroupant les noms des dentistes spécialisés dans le sport. Il est aussi important de sensibiliser les dentistes aux besoins spécifiques des personnes en situation de handicap, en soulignant que la prévention est beaucoup moins coûteuse que la prise en charge en urgence.
En quoi l’inclusion des personnes en situation de handicap renforce-t-elle la cohésion sociale et le vivre ensemble ?
Les personnes en situation de handicap sont souvent marginalisées. Les événements sportifs comme les Global Games permettent de les mettre en lumière et de montrer qu’avec des adaptations, elles peuvent atteindre un haut niveau de performance. Ces jeux permettent aux athlètes de rencontrer des personnes partageant la même passion et de se dépasser.
Lors des Global Games, un enfant atteint de trisomie 21 a pu voir des athlètes comme lui défiler avec leurs drapeaux, réalisant qu’il n’est pas seul et qu’il peut, lui aussi, devenir un athlète de haut niveau. C’est la première fois que les athlètes français des Global Games ont été accueillis à l’Élysée. Ces fédérations ont adapté le sport à cette population, ce qui montre qu’on peut aussi adapter la prise en charge dentaire pour ces personnes.