– Vous êtes la aujourd’hui ici pour nous parler du Magistère Européen de Génétique, et notamment des 40 ans du Magistère. Mais avant de parler de ça, est-ce que vous pouvez nous parler un peu de vous ?
Je suis professeur de génétique depuis un certain nombre d’années.
J’ai fait toute ma carrière au sein de l’université Paris-Diderot et ensuite de l’université Paris-Cité. J’ai occupé différentes fonctions, mais pour ce qui nous concerne aujourd’hui, je suis, avec mon collègue Jonathan Weitzman, co-directeur, à la fois du Magistère Européen de Génétique, du Master de Génétique, et de la Graduate School G.E.N.E.
– Pouvez-vous nous parler de ce Magistère ?
Il faut comprendre que le Magistère est imbriqué dans d’autres structures qui lui sont extrêmement liées. C’est l’un des parcours de la L3 Sciences de la Vie (parcours MEG), ainsi que du Master de Génétique porté par l’UFR Sciences du Vivant. Il est également intégré à l’intérieur de la Graduate School G.E.N.E. (Genetics and Epigenetics New Education), qui permet d’associer à cette formation L3, M1, M2, la formation doctorale au travers des deux écoles doctorales, BIOSPC et HOB. Cela permet également d’associer directement neuf institut et unités de recherche, en partie intégrées à l’UFR Sciences du Vivant, mais également à la faculté de santé.
Pour l’UFR à proprement dite, il y a quatre unités associées, l’Institut Jacques Monod (IJM), les Unités Biologie Fondamentale et Adaptative (BFA), Epigénétique et Destin Cellulaire (EDC), Biologie Intégrée du Globule Rouge (BIGR), mais également coté santé, l’Institut Imagine, l’Institut Cochin, l’Institut Necker Enfant Malade, l’Institut Robert Debré, l’Institut de Recherche Saint-Louis.
Et puis, et c’est important à souligner, l’Institut Pasteur, qui est étroitement associé au Magistère et à l’UFR.
Au global, le Magistère associé à la Graduate School G.E.N.E. est une structure pédagogique qui permet de fédérer de très nombreux acteurs de la génétique sur Paris Cité, et au-delà, en Ile-de-France, avec plus de 350 équipes de recherche qui sont associées au cursus. C’est, au total, plus de 270 chercheurs, enseignants-chercheurs qui participent à l’enseignement.
– Quelques points clés concernant ce Magistère ?
Premier point qui, pour moi, est important, c’est que même si on parle de génétique et d’épigénétique, les sujets et les domaines qui sont traités en termes de formation par la recherche sont beaucoup plus larges.
C’est une formation réellement pluridisciplinaire, pour certains aspects probablement interdisciplinaires, qui associe des domaines aussi variés que l’évolution, la biologie cellulaire, la génétique, mais également la biologie moléculaire, la génétique du développement, la bio-informatique…
L’autre élément clé, c’est que nous ne sommes pas organisés en parcours, c’est-à-dire qu’un étudiant ne va pas progressivement choisir un parcours dans tel ou tel domaine. En fait, il se construit sa propre formation à la carte.
L’essentiel du cursus est constitué sous forme de modules optionnels que choisissent les étudiants. Et chaque étudiant va finalement suivre une formation différente.
Aucun étudiant n’a suivi le même cursus qu’un autre. C’est vraiment une situation originale dans le paysage universitaire en biologie qui laisse quelque part une grande liberté aux étudiants de se construire leur propre parcours en fonction de leurs affinités et centre d’intérêts.
Le troisième aspect qui caractérise le Magistère est l’internationalisation.
C’est un cursus assez novateur en la matière depuis de nombreuses années. On croit beaucoup à la mobilité entrante et à la mobilité sortante pour les étudiants.
Chaque année, c’est la totalité des 42 étudiants de la licence 3 et des 48 étudiants du master 1 qui partent en stage entre 4 et 5 mois à l’étranger : en Europe, en Grande-Bretagne, et en Amérique du Nord.
Nous ne le faisons pas parce que les laboratoires sont différents dans ces pays, mais parce que cela leur permet de découvrir d’autres cultures, d’autres modes de fonctionnement, de sortir aussi de leur zone de confort. A l’issue de ces stages, ce ne sont plus les mêmes étudiants que nous avons en face de nous.
Et puis, à l’issue de ces deux ou trois années, l’ensemble du M2 et les stages étant en Anglais, la plupart deviennent bilingue. C’est important dans le monde scientifique.
Il y a également une mobilité entrante qui est très importante pour nous, qui se situe essentiellement au niveau M2. On accueille à peu près une trentaine d’étudiants étrangers par an.
Chaque année, c’est entre 10 et 12 nationalités différentes qui suivent le cursus. Je pense que c’est vraiment une richesse pour les étudiants que l’on forme.
On a également mis en place un certain nombre de doubles diplômes avec les universités de Milan, de Padoue-Biccoca, de Trieste et de Rome-La Sapienza. Il y a également des semaines de cours internationales avec les universités de Florence et de Barcelone.
Pour résumer : c’est une formation pluridisciplinaire, une formation à la carte et une formation fortement internationalisée.
– Le Magistère a fêté ses 40 ans en mars 2025. Est-ce que vous pouvez revenir sur la cérémonie qui a eu lieu et sur ce que ça représente ?
On organise une cérémonie tous les 5 ans. Et c’est pour nous un événement important, qui permet de rassembler des anciens étudiants du cursus.
Là aussi, c’est une situation originale dans le paysage universitaire, car les étudiants qui ont suivi leur cursus y gardent un attachement très fort, parfois 40 ans après l’avoir suivi.
C’est pour eux que nous l’organisons, et pour eux, l’occasion de se retrouver, de voir où en est le cursus, où en sont les avancées en génétique et en biologie. On a un réseau d’environ 2 000 anciens étudiants qu’on a pu constituer progressivement, avec lesquels on est en contact.
Cette année, c’est environ 300 personnes qui ont assisté à cette journée anniversaire.
Pour les 40 ans, Nous avons voulu organiser cette journée en mélangeant à la fois des aspects scientifiques, avec des conférences de personnalités scientifiques de premier plan, et des partages d’expériences avec des étudiants qui ont suivi le cursus auparavant et qui ont eu ensuite une belle carrière.
Je peux citer parmi les personnalités scientifiques Jean Weissenbach, qui est membre de l’Académie des Sciences et l’ancien directeur du Généthon puis du Génoscope, et qui a joué un rôle absolument majeur dans le séquençage du génome humain, ainsi que Yasmine Belkaid, directrice Générale de l’Institut Pasteur, qui est venue donner une magnifique conférence.
Cela a été également l’occasion de rendre hommage aux trois fondateurs du cursus que sont Joël Silber, Joël Aghion et Michel Volovitch.
– Est-ce que pendant votre carrière au sein du Magistere, vous avez un souvenir marquant à nous partager, ou une anecdote ?
Il y a une chose qui m’a vraiment touché, et le reste de l’équipe également : le confinement lié au Covid.
Cela a été extrêmement difficile. Le premier confinement a eu lieu en mars 2020. C’était quelques jours avant que les étudiants partent pour leur stage à l’étranger.
Et pour eux, c’est quelque chose dans lequel ils s’investissent énormément. Il a fallu leur annoncer que malheureusement, les choses tournaient mal et que ces stages n’étaient plus possibles. Et j’avoue que ça, ça a été un moment compliqué pour eux, pour nous, pour moi.
Après, des exemples plus positifs, il y en a énormément.
Chaque année, on organise une cérémonie de remise des diplômes et constater chaque année qu’on a entre 40 et 50 étudiants qui s’engagent dans une thèse, et franchement, c’est pour nous la meilleure récompense. La thèse en soi n’est pas une fin, mais en tout cas, c’est une preuve de ce que l’on peut apporter.
On essaye d’accompagner au mieux les étudiants, y compris lorsqu’ils rencontrent des difficultés. Je me souviens, à l’occasion d’une cérémonie de remise des diplômes, qu’une étudiante est venue me voir pour me remercier.
Elle m’a dit : « En première année du Magistère, je n’avais pas des résultats extraordinaires. Et puis, vous m’avez dit qu’il fallait m’accrocher, je suis sûr que vous allez y arriver. Je n’y croyais pas à ce moment-là, mais au final, ça a marché. »
Elle s’engageait dans une thèse alors que le début avait été difficile. Et ça, c’est une belle histoire.
– Qu’avez-vous à dire pour ceux qui veulent se lancer dans ce Magistère ?
Premier élément : qu’ils ne s’auto-censurent pas.
Les étudiants que nous prenons, nous les prenons avant tout sur leur motivation.
Ce qu’on leur demande, c’est de la curiosité, de la passion, parce que sans passion, on ne trouvera pas l’énergie d’aller au bout.
Et puis pas mal d’implication dans leurs études.
– Pour clôturer cette interview, est-ce que vous avez un dernier mot à ajouter, un message à faire passer ?
En tant que co-responsable du cursus, je souhaite adresser un immense remerciement à l’ensemble des collègues qui participent à l’organisation et au fonctionnement du cursus, à l’équipe rapprochée, qui est dans ce qu’on appelle le bureau du Magistère, qui s’implique quotidiennement dans le fonctionnement avec toute leur richesse et tout ce qu’ils peuvent apporter.
À l’ensemble des collègues, chercheurs, enseignants-chercheurs de l’UFR, qui s’impliquent également.
Et ça, ça fait la richesse du cursus, la capacité de ces collègues à ne pas nécessairement reproduire d’année en année ce que l’on fait, mais de toujours réfléchir à comment les choses progressent, comment les choses évoluent et comment on arrive à relever ces défis.
Site du Magistère : https://magistere-europeen-genetique.ijm.fr/
Site de GENE : https://eur-gene.u-paris.fr/