Transmission de l’identité à travers les générations

La transmission de l’identité à travers les générations nécessite le maintien et la bonne transmission de l’information génétique au cours de la division cellulaire. À cette fin, le génome doit être entièrement répliqué et les molécules d’ADN résultantes doivent être fidèlement distribuées aux cellules filles afin que chacune reçoive une copie complète du génome. Ici, nous utiliserons des approches complémentaires dans divers organismes modèles pour déchiffrer comment l’information génétique est transmise lors de la division cellulaire. De plus, nous questionnerons la notion de transmission : comment doit-on voir la transmission entre cellule et cellule fille ? Les mécanismes de division cellulaire doivent-ils faire partie des mécanismes généraux de l’hérédité ? Ou y a-t-il plusieurs concepts d’hérédité, selon que l’on traque des cellules ou des organismes ?

Cell Kissing

Paire de cellules épithéliales (MDCK), double marquage pour l’actine en rouge et adhésion focale en vert.

© Gautham Hari Narayana SANKARA NARAYANA, Institut Jacques Monod

Tous les organismes vivants sont construits à partir d’un grand nombre de cellules et d’une grande variété de types cellulaires avec une identité spécifique. Par exemple, un humain adulte est composé à peu près de 10¹³ cellules et d’environ 200 types de cellules différents, y compris les gamètes (ovule et sperme) qui sont essentiels à la reproduction sexuée. Un programme spécialisé de division cellulaire, la méiose, produit des gamètes haploïdes qui rétablissent la diploïdie chez un zygote lors de la fécondation. Les divisions cellulaires mitotiques augmentent le nombre de cellules en distribuant de manière égale et fidèle le génome répliqué dans les cellules filles. Des défauts dans la régulation de ces processus fondamentaux peuvent avoir des conséquences dramatiques, conduisant à la mort cellulaire ou à l’instabilité du génome, caractéristique des cancers.

Au cours des dernières décennies, d’énormes progrès ont été accomplis dans l’identification des facteurs et des machines moléculaires garantissant que le génome est fidèlement reproduit et transmis à la cellule fille au cours de la division cellulaire mitotique. De même, la machinerie et les mécanismes permettant la bonne ségrégation des chromosomes lors de la mitose émergent. Cependant, nous en savons beaucoup moins sur les mécanismes conduisant à la ségrégation chromosomique lors de la méiose féminine, qui se produit en l’absence de centrosomes. En outre, plusieurs mécanismes et processus ont été largement étudiés dans les détails, mais souvent non analysés en relation les uns avec les autres. Par exemple, bien que la transcription et la réplication de l’ADN aient été largement étudiées séparément, la façon dont les mécanismes régulant ces deux processus interagissent pour assurer l’intégrité du génome pendant la division cellulaire est beaucoup moins comprise. De même, l’influence des marques épigénétiques sur le programme de réplication de l’ADN est encore peu décrite. Au niveau cellulaire, les structures macromoléculaires comme les complexes formant les pores nucléaires (NPC), qui régulent le transport nucléo-cytoplasmique, l’organisation du génome et la transcription pendant l’interphase doivent être démantelées pendant la mitose et réassemblées de manière ordonnée après la mitose. Comment ces grands complexes macromoléculaires sont démantelés et réassemblés au cours de la division cellulaire est encore mal compris.

La communauté scientifique du Labex est dans une position unique pour combler ces lacunes car notre communauté rassemble des experts en pores nucléaires, transcription, réplication et réparation de l’ADN, épigénétique, polarité cellulaire, division cellulaire méiotique et mitotique. Profitant du réseau de collaboration existant, nous appliquons un large éventail de modèles expérimentaux et d’approches intégrées pour étudier les processus aux interfaces entre différentes disciplines afin de démêler de nouveaux concepts. L’accent est mis sur l’intégration des processus et des mécanismes de contrôle de la qualité et sur la manière dont cette orchestration est essentielle pour l’établissement et la transmission des identités cellulaires.
Plus précisément, nous étudions l’influence des marques épigénétiques sur le programme de réplication de l’ADN et le couplage entre la transcription et la réplication de l’ADN, la réparation de l’ADN mais aussi la méiose et la mitose. En particulier, nous explorons la division cellulaire mitotique dans un contexte de développement et étudions comment les relations croisées entre la mitose, le destin cellulaire et la polarité cellulaire influencent l’identité cellulaire.
Globalement, nous étudions la transmission de l’identité à travers les générations à plusieurs niveaux, en déchiffrant comment la fidélité de la réplication de l’ADN et les mécanismes de réparation de l’ADN assurent la transmission de molécules d’ADN sans mutation à travers les générations, mais aussi comment le timing de la réplication de l’ADN, modulé par les ou des signaux externes (marques épigénétiques), peuvent influencer la production de types de cellules avec des identités différentes.

De plus, la notion de transmission soulève des questions philosophiques concernant la stabilité de l’identité à travers les générations. La biologie évolutive a fourni des outils statistiques pour mesurer cette stabilité et pour évaluer les contributions respectives des environnements et des parents dans une population. Tout au long de l’histoire de la biologie, la notion de transmission est devenue la notion statistique d’héritabilité et la notion de gène, qui s’est progressivement matérialisée en ADN. Cependant, des progrès récents ont montré qu’il y a plus que des gènes à hériter. Alors, comment comprendre exactement les concepts de gène, d’héritabilité, d’hérédité et de transmission ? Cette analyse conceptuelle nécessite une compréhension historique approfondie de ces concepts, y compris la manière dont ils ont été utilisés expérimentalement. Nous interrogeons le concept de transmission : comment voir la transmission entre cellule et cellule fille ? Les mécanismes de division cellulaire doivent-ils faire partie des mécanismes généraux d’hérédité ? Ou y a-t-il plusieurs concepts d’héritage, selon que l’on suit les cellules ou les organismes ? Cette question devient cruciale dans les débats sur le rôle et l’importance de l’épigénétique en biologie évolutionniste ou en sociologie. Le Labex examine l’hypothèse philosophique selon laquelle les distinctions entre les systèmes d’héritage (c’est-à-dire la génétique, l’épigénétique) sont intrinsèquement liées aux différences d’échelle de temps dans les facteurs environnementaux récurrents.

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