Journées d’études organisées par Guido Furci (Université Sorbonne Nouvelle), Marie Mossé (Université Paris Cité), Florence Schnebelen (Université Polytechnique Hauts-de-France)

Journée 1 : vendredi 21 mars 2025 (Université Sorbonne Nouvelle / Maison de la Recherche)

Journée 2 : vendredi 21 novembre 2025 (Université Paris Cité / Campus des Grands Moulins)

« Ce n’est donc pas un voyage d’agrément que vous entreprenez, mais plutôt l’Allemagne que vous avez voulu fuir ? »
Klaus Mann, La fuite au Nord [1934], Grasset, 1997, p. 17

AAC téléchargeable

Argumentaire

De la navigation de Pythéas de Marseille vers les horizons brumeux de Thulé (VIIIe siècle av. J. C.) aux traversées arctiques de Knud Rasmussen, Fridtjof Nansen ou Paul-Émile Victor (XXe siècle) en passant par les expéditions britanniques élisabéthaines et victoriennes en quête du Passage du Nord-Ouest, l’imaginaire occidental des voyages au Nord tend à privilégier le motif d’une course au nord : quête concrète et impérialiste de territoires, de voies, de ressources matérielles et humaines ; quête symbolique de l’exploit héroïque – souvent viril – individuel ou collectif, du dépassement de soi comme du prestige national… Ce sont autant de motifs dont se ressaisissent les littératures fictionnelles occidentales : on songe aux romans d’aventure de l’Écossais Robert Michael Ballantyne ou de l’Américain Jack London, qui façonnent un tel imaginaire du Grand Nord canadien chez leurs jeunes et moins jeunes lecteurs des XIXe et XXe siècles.

Nous nous proposons d’analyser un autre aspect des représentations du voyage vers les pays froids, qui serait l’envers de la course au nord : la fuite au nord. Dans son roman Fuite au Nord, paru en allemand sous le titre Flucht in den Norden en 1934, Klaus Mann transpose et transfigure sa situation d’exil face au nazisme à travers l’histoire de Johanna, jeune femme allemande que son affiliation au communisme contraint à se réfugier en Finlande dans les années 1930. Les paysages nordiques sont pour Johanna le berceau d’une double découverte : la sérénité de la nature septentrionale, mais aussi l’amour et le bonheur avec Ragnar, qui estompent le fond historique menaçant d’un pays bientôt déchiré par les velléités d’annexion de ses voisins. La fuite au nord est alors synonyme de retraite spirituelle et amoureuse ; de privilège accordé à la liberté et à l’épanouissement individuels au détriment de la responsabilité collective ; de soustraction aux remous de l’Histoire et à la violence du monde moderne au profit d’un refuge dans un univers de pureté et de beauté immémoriales.

Le motif de la fuite au nord nous invite donc à remodeler l’imaginaire occidental du Nord, héritier d’une littérature de voyage façonnée aussi bien par les sagas islandaises médiévales relatant la découverte du Groenland et de Terre-Neuve (Vínland) que par les récits d’exploration de l’Arctique. Le motif de la fuite au nord esquisse une nouvelle cartographie du danger et de l’hostilité, qui déplace les lignes d’opposition entre Nord et Sud et crée de nouvelles représentations.

Nous nous attacherons à étudier les textes, fictionnels ou non, qui abordent le motif de la fuite au nord en nous demandant si celui-ci ne constitue que la part d’ombre de l’historiographie du tropisme nordique des Occidentaux, son occulte versant négatif, ou s’il représente une modalité bien distincte et autonome du déplacement vers le nord. De manière emblématique, les Vikings Eiríkr Rauði (dit “le Rouge”) et Leifr Eiríksson, personnages cardinaux des sagas du Vínland, concentrent sur eux toute l’ambivalence de cette question : à l’origine de leur course vers l’Islande, le Groenland et le Vínland, perpétuée de génération en génération, il y a le bannissement d’un meurtrier, déclaré hors-la-loi en Norvège… En d’autres termes, s’intéresser au motif de la fuite au Nord, est-ce mettre au jour de nouveaux corpus utiles à l’étude de l’imaginaire du Nord… ou est-ce lire d’un œil nouveau ces corpus bien connus ?

Comment les littératures narratives, fictionnelles et non-fictionnelles, construisent-elles ce motif de la fuite au nord ? Proposent-elles le récit d’une mobilité contrainte, d’un exil, d’un bannissement ou d’une quête inversée ? Quels en sont les objectifs et les enjeux ? Que cherchent celles et ceux qui orientent leur fuite vers le nord ? Un refuge dans une nature fantasmée, « pays de cocagne[1] » et « nouvelle Arcadie[2] » ? Un autre modèle social ? Aspirent-elles / -ils à un espace pour ainsi dire désert[3], dans lequel tout serait possible ? On portera également attention aux conditions – matérielles et psychologiques – dans lesquelles s’organise la fuite, ainsi qu’à sa temporalité : est-elle désordonnée, dans un parcours aveugle vers les points les plus extrêmes ? Est-elle minutieusement préparée et jalonnée d’étapes préalablement définies ? Enfin, la fuite a-t-elle un but précis ? Appelle-t-elle un retour ? Ou s’apparente-t-elle à une errance ?

De telles questions se justifient tout particulièrement en raison de la labilité de la notion même de N/nord, que la langue française fait apparaître, de manière particulièrement intéressante pour nous sur le plan heuristique : Nord avec majuscule pour la région ou le lieu ; nord avec minuscule pour la direction ou le point cardinal. Les spécialistes d’études nordiques, au sens le plus littéral du terme, le rappellent ainsi :

« Immanquablement, le Nord nous apparaît comme pluriel et mouvant. […] Quant au territoire nordique, ses frontières ne peuvent se définir que par des données variables, climatiques ou culturelles. Le Nord esquive finalement toute tentative de se laisser définir, à défaut de se laisser mesurer »[4].

À cela s’ajoute une richesse / difficulté supplémentaire pour la pensée : le N/nord est étroitement relatif à l’endroit – littéral et / ou figuré – d’où on le regarde, d’où on l’écrit, d’où l’on part pour le rejoindre, de manière concrète ou asymptotique. Si le géographe québécois Louis-Edmond Hamelin a tâché d’identifier les traits définitoires de ce qu’il a appelé la nordicité[5], depuis Paris, le N/nord recouvre aussi bien les Hauts de France que la Belgique, les Pays-Bas, la Scandinavie continentale et insulaire ou… la Sibérie[6] ; pour les Mexicains qui cherchent une vie meilleure aux États-Unis, ce sont Albuquerque, Phoenix, Los Angeles qui incarnent ce N/nord[7] ; pour les migrants syriens ou libyens, ce sont l’île de Lampedusa, Milan, Calais[8]… L’axiologie du N/nord est tout aussi mouvante dans l’imaginaire de quiconque regarde dans sa direction : lieu de richesse et de pouvoir pour les uns[9] ; terre de ressources à exploiter pour les autres[10]. Pour les Inuits, inversement, la notion de N/nord, géographique et a fortiori symbolique, n’existe pas : tributaire de la mise en coupe réglée cartographique du territoire, elle ne saurait s’accommoder de la manière holistique dont les Inuits conçoivent ce territoire, mais aussi ce qui les lie à lui ; ils préfèrent dès lors aux points cardinaux les mouvements éoliens, repères à la fois perpétuels et mouvants[11]. Le motif de la fuite au nord devient-il dès lors un impensé pour eux ?… Ou en renouvellent-ils encore le traitement ? 

Les contributions pourront émaner de spécialistes de littérature, d’histoire culturelle, d’études viatiques, d’études de genre, d’intermédialité, de sociologie. Elles traiteront de corpus littéraires et artistiques de toutes époques et ne seront pas astreintes à une compréhension restrictive de la notion de N/nord, dans la mesure où elles s’attacheront à justifier et à problématiser ce qu’elles entendent par N/nord. Toutes les perspectives critiques seront les bienvenues. Les corpus envisagés par les différentes contributions ne se limiteront pas aux genres fictionnels. Les propositions de communication pourront s’inscrire – sans s’y restreindre – dans les axes problématiques suivants :

1°) Questions poétiques

On pourra s’interroger sur les éléments structurants du motif de la fuite au Nord, ce qui permettra également de réfléchir sur le statut de transfuge de ces éléments, des récits traditionnels ou contes folkloriques à la littérature moderne et contemporaine. À titre d’exemple, la typologie des personnages qui fuient au Nord, de l’anti-héros au nouveau héros, est riche de questionnement : les héros à contre-emploi, nordiques / nordistes malgré eux ; les marginaux – ermite, poète, coureur des bois – voire les hors-la-loi – héros criminels d’Anne Hébert (Kamouraska) et de Constantin Weyer (La Loi du Nord) ; proscrits des sagas islandaises ; naa’in des Gwich’in d’Alaska ; qivitoq groenlandais qui ressurgissent dans l’écriture contemporaine de Niviaq Korneliussen – et / ou tout simplement les femmes, dont la présence ou même l’aspiration au N/nord fut longtemps rendue transgressive par la répartition genrée des rôles sociaux.

La portée poétique, voire métapoétique du motif de la fuite au Nord pourra également être interrogée : quels registres se trouvent associés à ce type de déplacement ? comment s’opèrent, le cas échéant, le déplacement et la remise en question des codes, thèmes et catégories génériques traditionnels, issus de la veine héroïque du voyage vers le Nord. Comment la rencontre de l’écriture de la fuite et du boréalisme est-elle dramatisée ? Quelles différences ces récits manifestent-ils vis-à-vis des codes de la littérature viatique et des découvertes boréales entre émerveillement et inconfort ? En passe-t-on par le pastiche et / ou la parodie ? Enfin, quelles relations se tissent éventuellement entre le motif de la fuite au Nord et la représentation du geste créateur, du créateur ou de la créatrice ?

2°) Questions politiques

Il sera pertinent de se questionner sur le statut social et politique des auteur-e-s de fictions et / ou de littérature référentielle qui reprennent cette trame narrative : la fuite au Nord est-elle un motif de prédilection pour des autrices et auteurs émanant de communautés opprimées, traditionnellement exclues des représentations du voyage au Nord (les femmes) ou cantonnées dans un certain schéma narratif et une constellation de personnages (les peuples autochtones circumpolaires et arctiques, tantôt adversaires, tantôt utilités, tantôt objets de convoitise) ? Dans quelle mesure ces problématiques sont-elles transposées aux personnages de leurs récits : est-ce dans une perspective spéculaire ou dans une perspective critique ?

De même, ce motif de la fuite au Nord est-il historiquement situé et, le cas échéant, à quel(s) événement(s) ou élément(s) contextuel(s) doit-il son existence ? Ou faut-il postuler sa permanence, son existence parallèle à celle du récit officiel de la course au Nord, dont il représenterait une face cachée, un versant alternatif ? Dans un cas comme dans l’autre, quel imaginaire du Nord ce motif construit-il ? Jusqu’à quel point sont valides les oppositions axiologiques telles que loi / liberté, utopie / dystopie et, le cas échéant, dans quelle mesure l’expérience vécue ou rêvée du N/nord et sa mise en discours les réélaborent-elles ?  

3°) Questions épistémologiques

Enfin, on appréciera tout particulièrement les contributions qui essaient de relier le motif de la fuite au N/nord aux champs de la théorie littéraire et de l’histoire des représentations : le motif de la fuite au N/nord tel qu’il est mis en œuvre dans les littératures et les arts atteste-t-il d’une volonté – de l’autrice, de l’auteur, de l’artiste – de déboréaliser ou de (re)boréaliser le boréalisme ? Et, si l’on déplace la perspective de l’horizon de création à l’horizon de réception, quels outils critiques et théoriques la communauté des chercheuses et chercheurs peut-elle mettre en œuvre pour penser ce motif ?

On pourra se demander dans quelle mesure l’étude du motif de la fuite au N/nord entre éventuellement en résonance avec une entreprise de « recomplexification »[12] de l’imaginaire du Nord, objet de discours dont Daniel Chartier rappelle qu’il s’est construit essentiellement à l’extérieur des territoires nordiques, par et pour celles et ceux qui ne connaissaient pas ces territoires de manière empirique. La confrontation entre perspective(s) exogène(s) et perspective(s) endogène(s) – en particulier issues de communautés autochtones circumpolaires et / ou arctiques – sur le Nord, permet-elle de penser ce motif d’une manière inédite et, inversement, trouve-t-elle à travers lui une voie/x nouvelle ? Dans une telle optique, on prêtera une attention toute particulière aux contributions monographiques ou comparatistes dévolues à l’étude de corpus littéraires autochtones des espaces nordiques.

Modalités pratiques

La manifestation scientifique s’articulera en deux journées d’étude, la première organisée à l’Université Sorbonne Nouvelle le vendredi 21 mars 2025 et consacrée au(x) Nord(s) occidental/aux et la seconde organisée à l’Université Paris Cité le vendredi 21 novembre 2025 et consacrée au(x) Nord(s) extra-occidental/aux.

Les propositions de communication sont à adresser pour le 15 novembre 2024 aux adresses suivantes : guido.furci@sorbonne-nouvelle.fr ; marie.mosse@univ-eiffel.fr ; florence.schnebelen@uphf.fr. Les notifications d’acceptation / refus seront adressées aux contributrices / contributeurs d’ici la fin du mois de novembre. Les déjeuners seront pris en charge par le comité d’organisation ; le transport et l’hébergement seront à la charge des participantes et participants.

Indications bibliographiques

BARTON Hildor Arnold, Northern Arcadia: Foreign Travelers in Scandinavia, 1765-1815, Carbondale, Southern Illinois University Press, 1999.

BELLEMARE-PAGE Stéphanie, Daniel CHARTIER, Maria WALECKA-GARBALINSKA et Alice DUHAN (dir.), Le lieu du Nord. Vers une cartographie des lieux du Nord, Québec / Stockholm, Presses de l’Université du Québec / Université de Stockholm, coll. « Droit au pôle », 2015.

BERTRAND Gilles, Daniel CHARTIER, Alain GUYOT, Marie MOSSÉ, Anne-Élisabeth SPICA (dir.), Voyages illustrés aux pays froids (XVIe-XIXe siècle). De l’invention de l’imprimerie à celle de la photographie, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise Pascal, coll. « Littératures », 2020.

BRIENS Sylvain, « Boréalisme. Le Nord comme espace discursif », Études germaniques, n°282, 2016/2, Le boréalisme, 2016, p. 179-188.

BRIENS Sylvain, « Boréalisme. Pour un atlas sensible du Nord », Études germaniques, n°290, 2018/2Le boréalisme 2.0, p. 151-176.

BOURGUIGNON Annie et Konrad HARRER (dir.), Writing the North of the North. Construction of Images, Confrontation of Reality and Location in the Literary Field – L’Écriture du Nord du Nord. Construction d’images, confrontation au réel et positionnement dans le champ littéraire – Den Norden des Nordens (be-)schreiben. Bildkonstruktion, Wirklichkeitsbezug und Positionierung im literarischen Feld, Berlin, Frank & Timme, 2019.

CHARTIER Daniel, Qu’est-ce que l’imaginaire du Nord ? Principes éthiques, édition multilingue, Harstad / Montréal, Arctic Arts Summit / Imaginaire │ Nord, coll. « Isberg », 2018.

CHARTIER Daniel (dir.), Le(s) Nord(s) imaginaire(s), Montréal, Imaginaire | Nord, coll. « Droit au pôle », 2008

DAVIDSON Peter, The Idea of North, Islington, Reaktion Books, 2016

FJÅGESUND Peter et Ruth A. Symes, The Northern Utopia. British Perceptions of Norway in the Nineteenth Century, Amsterdam / New York, Rodopi, 2003

FJÅGESUND Peter, The Dream of the North: A Cultural History to 1920, Amsterdam, Rodopi, 2014

HAMELIN Louis-Edmond, Discours du Nord, Québec, GÉTIC, Université Laval, coll. « Recherche », 35, 2002

HAMELIN Louis-Edmond, La Nordicité du Québec, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2014

HAMELIN Louis-Edmond, Nordicité canadienne, Montréal, Hurtubise HMH, 1975

ÍSLEIFSSON Sumarliði R., Deux îles aux confins du monde. Islande et Groenland, Québec, Presses de l’Université du Québec, coll. « Droit au Pôle », 2018

McCORRISTINE Shane, Spectral Arctic. A History of Dreams and Ghosts in Polar Exploration, Londres, UCL Press, 2018.

McGHEE Robert, The Last Imaginary Place. An Human History of the Arctic World, Oxford, Oxford University Press, 2005.

MOHNIKE Thomas, « Narrating the North. Towards a Theory of Mythemes of Social Knowledge in Cultural Circulation », Deshima. Revue d’histoire globale des Pays du Nord, 14/2020, p. 9-36

ORLANDINI CARCREFF Alessandra, Au pays des vendeurs de vent. Voyager en Laponie et en Finlande XVe-XIXe siècle, Aix-en-Provence / Marseille, Presses universitaires de Provence, coll. « Textuelles », 2017

OSLUND Karen, Iceland imagined. Nature, Culture, and Storytelling in the North Atlantic, Seattle / Londres, University of Washington Press, 2011

SALVADORI Pierre-Ange, Le Nord de la Renaissance. La carte, l’humanisme suédois et la genèse de l’Arctique, Paris, Classiques Garnier, 2021

SCHNAKENBOURG Éric (dir.), De l’Ultima Thulé à l’Arcadie nordique : perceptions et représentations du Nord de la fin du Moyen Age au XVIIIe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012

SCHNAKENBOURG Éric (dir.), Figures du Nord : Scandinavie, Groenland, Sibérie. Perceptions et représentations des espaces septentrionaux de la fin de Moyen Âge au XVIIIe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012

TOUDOIRE-SURLAPIERRE Frédérique, L’imaginaire nordique. Représentations de l’âme scandinave (1870-1920), Paris, L’Improviste, coll. « Les aéronautes de l’esprit », 2005

WÆRP Henning Howlid, Arktisk litteratur – fra Fridtjof Nansen til Anne B. Ragde, Stamsund, Orkana Akademisk, 2017

 

[1] Karel Čapek, Voyage vers le Nord [1939], Paris, Les éditions du sonneur, 2010, préface de Cees Nooteboom, p. 10. Dans ses carnets rédigés lors d’un voyage en 1936 pour échapper à la menace nazie, Karel Čapek donne par exemple du Danemark une vision édénique (« Partout, les pâturages de Dieu. Rien qu’une vaste exploitation divine, si soignée, si bien conçue qu’on n’y voit pas trace du labeur humain », p. 28). Il y présente son voyage comme un « pèlerinage dans le Nord » (p. 20).
[2] Voir Hildor Arnold Barton, Northern Arcadia: Foreign Travelers in Scandinavia, 1765-1815, Carbondale, Southern Illinois University Press, 1999.
[3] Dans son essai Qu’est-ce que l’imaginaire du Nord ? Principes éthiques (2018), Daniel Chartier rappelle que l’idée d’un Nord désert est un stéréotype du discours impérialiste : dans une logique coloniale, si les territoires nordiques sont vides, notamment de cultures, l’exploitation de leurs ressources au détriment de populations autochtones bel et bien existantes se trouve alors justifiée.
[4] Alessandra Ballotti, Claire McKeown et Frédérique Toudoire-Surlapierre (dir.), De la nordicité au boréalisme, Reims, Épure, 2020, Frédérique Toudoire-Surlapierre, Sylvain Briens, Alessandra Ballotti, Claire McKeown, « Introduction. Nordicité et boréalisme : entre deux pôles ? », p. 24.
[5] La nordicité est l’« état, niveau et conscience d’une territorialité froide à l’intérieur de l’hémisphère boréal » (Louis-Edmond Hamelin, Écho des pays froids, Sainte-Foy, Presses de l’Université Laval, 1996, p. 243.
[6] Pour les Vikings du Xe siècle, le Nord, c’était l’Ouest (de la Norvège à Terre-Neuve en passant par les Îles Féroé, l’Islande et le Groenland) ; pour l’écrivain-voyageur français Cédric Gras, le Nord, c’est l’Est (voir Cédric Gras, Le Nord, c’est l’Est. Aux confins de la Fédération de Russie, Paris, Phébus, coll. « Libretto », 2013).
[7] La littérature mexicaine investit d’ailleurs cet espace de la frontière Mexique / États-Unis, ainsi que le récit de sa traversée rêvée ou effective : on songe à deux recueils de nouvelles que sont  Le Llano en flammes (El Llano en llamas) (1953, 1971) de Juan Rulfo et La frontière de verre (La frontera de cristal) (1999) de Carlos Fuentes. Dans la littérature étasunienne contemporaine, on pense à American Dirt (2020) de Jeanine Cummins.
[8] De la même manière, la fuite au nord des migrants du Bassin méditerranéen devient une matière littéraire, traitée dans une veine documentaire (par exemple, dans L’Opticien de Lampedusa (2016) d’Emma-Jane Kirby) ou fictionnelle et intermédiale (voir notamment la série de bandes-dessinées en 3 tomes L’Odyssée d’Hakim (2018-2021), de Fabien Toulmé). 
[9] Songeons à la géographie ou géopolitique scolaire dont nous sommes largement tributaires au cours de notre formation, et qui oppose les Nords – pays économiquement développés et dotés d’un pouvoir d’arbitrage et de décision international – aux Suds – pays en voie de développement, le plus souvent marqués par un passé colonial plus ou moins proches.
[10] Au Canada, le Nord des communautés autochtones circumpolaires et arctiques est littéralement gouverné par le Sud d’origine et de culture occidentales, de Montréal à Vancouver. Il en va de même pour la Sibérie, conquise et colonisée par une Russie d’héritage européen.
[11] Louis-Jacques Dorais, « Terre de l’ombre ou terre d’abondance ? Le Nord des Inuit », dans Daniel Chartier, Le(s) Nord(s) imaginaire(s), Montréal, Imaginaire | Nord, coll. « Droit au pôle », 2008, p. 15 et suivantes.
[12] C’est sur cette notion programmatique, sur un double plan épistémologique et éthique, que Daniel Chartier conclut son essai Qu’est-ce que l’imaginaire du Nord ? (2018).

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