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Appel à contributions pour la revue Écrire l’histoire

« Reconstitutions »

Numéro à paraître courant 2027

[English below]

Dans les domaines cinématographique, télévisuel, scénique ou artistique, les contraintes de la reconstitution historique sont fréquemment associées à un idéal de résurrection du passé et à un impératif de respect des données événementielles, matérielles ou archéologiques susceptible de témoigner du professionnalisme de la production dans différents domaines : décors, costumes, accessoires, figuration, voire scénario et dialogue (déroulé chronologique, causalité historique, fonctionnement social). Pour ce faire, les œuvres peuvent mobiliser la collaboration de spécialistes extérieurs au domaine créatif, qui apportent une caution de conformité et de respectabilité à l’ensemble.

La reconstitution se heurte fréquemment, néanmoins, à ses propres limites : pressions budgétaires et temporelles associées au domaine de création, connaissances incomplètes ou discutées, difficultés à documenter l’intégralité concrète et le quotidien d’une époque révolue, nécessité d’adapter l’effort de restitution aux attentes des publics contemporains, etc. En outre, l’effort de restitution matérielle peut être appréhendé moins comme une ambition que comme une pesanteur, si ce n’est une servitude, la représentation visuelle du passé renvoyant dans cette optique à une dimension naïvement scolaire ou didactique, fatalement partiale ou illusoire, dont l’art aurait intérêt à s’émanciper.

De fait, l’attention académique accordée aux tentatives de reconstitution a d’abord résulté d’une vigilance disciplinaire d’origine historienne, évaluant les œuvres au prisme de leur degré de conformité aux connaissances disponibles, approche souvent peu préoccupée par les enjeux proprement créatifs et imaginaires, peu sensible voire hostile aux nécessités de l’anachronisme, du déplacement et de l’actualisation. Nombreux ont été les travaux, par ailleurs, attachés aux usages idéologiquement chargés de la reconstitution, le discours historique dont elle est le vecteur agissant à son tour, au moment de sa réception, sur un contexte socio-politique déterminé. Une autre approche semble spécifiquement liée, depuis quelques années, aux enjeux techniques et aux savoir-faire artisanaux présidant aux réalisations de grande envergure, aspects faisant l’objet d’une attention croissante de la recherche, par exemple dans le domaine du cinéma (dessins préparatoires, trucages, habillage-maquillage-coiffure [HMC], retombées environnementales, etc.). Les approches économiques et institutionnelles ont également pu croiser, ponctuellement, certaines productions historiques dont les dimensions et le faste ont semblé exemplaires en raison des ressources et des collaborations mobilisées.

Dans cette perspective, le présent numéro de la revue Écrire l’histoire souhaite repartir de la question de la reconstitution, malgré son caractère d’évidence et sa possible trivialité, pour interroger de façon problématisée l’entrecroisement constant des questions matérielles, historiques, créatives et esthétiques. On souhaiterait en particulier donner à observer la manière dont l’écriture et la vision historiques déterminent les choix de reconstitution, tout en étant en retour déterminées et reconfigurées par ces derniers. On pourra mettre en lumière les marges d’invention et de stylisation laissées aux artistes par les sources à disposition, le jeu des références visuelles et des niveaux d’intertextualité propres à toute production d’image, le caractère imprévisible de processus créatifs qui se limitent rarement au simple décalque, les modalités d’implication des publics face à la diversité des échelles et des formats, ou encore les stratégies destinées à générer un sentiment d’authenticité. Ces orientations pourront être l’occasion de revenir sur le caractère collectif et partagé d’écritures essentiellement non verbales, visuelles et matérielles de l’Histoire, déterminées par des contraintes techniques et institutionnelles sans cesse renouvelées, mais aussi par les évolutions du champ historique proprement dit. En sens inverse, l’emprise et l’influence de ces reconstitutions visuelles sur la recherche académique pourront faire l’objet d’une réflexion spécifique. Conjointement, on pourra interroger le foisonnement des reconstitutions costumées à caractère festif ou commémoratif, en lien avec certaines tendances culturelles contemporaines (essor de la patrimonialisation nationale ou régionale, du médiévalisme, de l’histoire militaire, etc.) et avec la diversité des réappropriations. La reconstitution pouvant être tout autant une tentative résurrectionnelle qu’une opération idéologique, les implications politiques de la reconstitution dans ses déclinaisons actuelles pourront faire l’objet de propositions spécifiques.

Les objets abordés pourront relever de l’ensemble des arts de l’image animée (cinéma, télévision, jeu vidéo) et de la scène, sans limitation à une période temporelle. Des travaux portant sur des aires non-occidentales seront particulièrement appréciés. Les enjeux sonores de la reconstitution pourront être pris en considération, de même que les dispositifs muséaux.

Les propositions de contribution, en français et en anglais[1], d’une longueur de 2000 à 3000 signes, accompagnés d’un état bibliographique provisoire, sont attendues pour le 15 avril 2026. Les propositions retenues donneront lieu à une remise d’article d’ici au 15 novembre 2026.

Direction du numéro et contacts

Gaspard Delon – gaspard.delon@u-paris.fr

Marie Frappat – marie.frappat@u-paris.fr

Université Paris Cité – Laboratoire CERILAC – UFR LAC

https://u-paris.fr/cerilac/

La revue

https://www.cnrseditions.fr/revue/ecrire-lhistoire/

 

Call for Papers for the Journal Écrire l’histoire

“Reconstructions”
Issue to be published in 2027

 

In the fields of cinema, television, theatre, and the arts, the practice of historical reconstruction is often associated with the dual ideal of reviving the past and adhering to factual, material, or archaeological accuracy. Such fidelity is typically viewed as a hallmark of professional excellence, reflected in domains as varied as set design, costume, props, extras, and even scriptwriting and dialogue (chronological sequence, historical causality, social practices). To this end, productions frequently enlist the expertise of specialists from beyond the creative sphere, whose authority guarantees the overall credibility and respectability of the project.

Yet reconstruction inevitably encounters its own limitations: the financial and temporal constraints inherent in any creative process; the incompleteness or contestation of historical knowledge; the difficulty of documenting the material and everyday realities of vanished worlds; and the need to adapt reconstruction to the expectations of contemporary audiences. Moreover, the very endeavour to reproduce the past in material form may be perceived less as an artistic aspiration than as a burden—or even a form of servitude—whereby the visual representation of history assumes a naïvely academic or didactic guise, inevitably partial or illusory, from which art might seek to liberate itself.

Academic engagement with reconstruction has long stemmed from the disciplinary vigilance of historians, assessing works according to their degree of conformity with established knowledge. Such assessments have often shown limited concern for creative or imaginative processes, and little sympathy for anachronism, displacement, or reinterpretation. Numerous studies have also examined the ideologically charged uses of reconstruction, whereby the historical discourse embedded in representation interacts with the socio-political context of its reception. More recently, attention has turned to the technical challenges and craftsmanship of large-scale productions—subjects that have gained increasing scholarly interest in fields such as cinema (storyboarding, special effects, costume, make-up and hairstyling, environmental impact, and so forth). Economic and institutional analyses have likewise intersected with case studies of historical productions whose magnitude or splendour exemplifies the networks of resources and collaboration they mobilise.

Against this background, this issue of Écrire l’histoire seeks to revisit the notion of reconstruction—despite, or precisely because of, its apparent obviousness and ubiquity—in order to explore the constant entanglement of material, historical, creative, and aesthetic concerns. In particular, we aim to highlight how historical writing and vision inform the choices involved in reconstruction, while simultaneously being shaped and reconfigured by them. Contributors are invited to examine the scope for invention and stylisation that available sources afford artists; the interplay of visual references and intertextual strata intrinsic to image-making; the unpredictability of creative processes that rarely amount to mere replication; the ways in which audiences participate across diverse scales and formats; and the strategies employed to evoke authenticity.

Such approaches may also provide an opportunity to reconsider the collective and shared nature of essentially non-verbal, visual, and material modes of historical writing—modes conditioned by ever-evolving technical and institutional constraints, as well as by developments within the discipline of history itself. Conversely, contributors might reflect on how these visual reconstructions, in turn, influence academic research. Furthermore, the proliferation of festive or commemorative costume re-enactments invites reflection on contemporary cultural phenomena such as the rise of national or regional heritage movements, medievalism, or the popularisation of military history, together with their diverse reappropriations. Since re-enactment may function as both an act of revival and an ideological operation, its political implications in present-day contexts are also welcome areas of inquiry.

Submissions may address all forms of the moving image (film, television, video games) as well as the performing arts, without temporal restriction. Contributions focusing on non-Western contexts are particularly encouraged. Consideration may also be given to the sonic dimensions of reconstruction and to museographic practices.

Proposals, in French or English[2], of between 2,000 and 3,000 characters (including spaces), accompanied by a provisional bibliography, should be submitted by 15 April 2026. Authors of selected proposals will be invited to submit their full articles by 15 November 2026.

Issue editors and contact details:

Gaspard Delon – gaspard.delon@u-paris.fr

Marie Frappat – marie.frappat@u-paris.fr

Université Paris Cité – Laboratoire CERILAC – UFR LAC

https://u-paris.fr/cerilac/

Journal

https://www.cnrseditions.fr/revue/ecrire-lhistoire/

[1] La revue ne garantissant pas le financement de traductions, les auteurs et autrices retenus devront veiller à proposer une traduction de leur article.

[2] As the journal does not guarantee funding for translations, authors whose articles are accepted must ensure that a French translation of their article is provided.

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