SAMEDI 7 DÉCEMBRE 

 

AMPHI 2A – HALLE AUX FARINES – CAMPUS GRANDS MOULINS

PROGRAMME COMPLET

Perdre pied, être débordé, s’étourdir ou s’extasier. À quels enjeux ou ressorts de la vie psychique renvoient les expériences de vacillement et de vertige ? Si le premier évoque la perte d’équilibre (le sol tremble ou se dérobe), le second résonne du côté d’un excès de sensation qui, dans le langage courant, est associé à l’angoisse (C’est le Vertigo d’Hitchcock, dont le titre français, Sueurs froides, parle de lui-même).

Vacillement et vertige appellent la représentation d’un sol, d’un élément de stabilité, potentiellement défaillant. Quel pourrait être le sol du moi ou, pour le dire autrement, du sentiment d’existence – voire de l’identité ? La réalité ? L’autre ? La conflictualité psychique, l’attaque constante de la pulsion et la fragilité constitutionnelle d’un moi qui se voudrait invincible compliquent, dès le début, l’idée même d’un sol pour Psyché.

Du doute chronique de l’obsessionnel, dont la pensée balance indéfiniment, aux pertes de conscience de l’hystérique, le vacillement est indissociable des débuts de la psychanalyse. Avec la seconde topique, il se déplace vers le moi lui-même qui perd son statut d’allié fiable pour devenir cet « être de frontière » soumis aux pressions de trois maîtres. Mais c’est avec les psychanalystes postfreudiens que l’idée d’un moi fragile, vacillant, prend véritablement de l’ampleur : les théories des fonctionnements limites, des personnalités narcissiques ou encore des troubles narcissiques-identitaires, la montée en puissance de la notion de Self, mettent au travail l’idée d’un flottement de l’être, d’une difficulté du sujet à se situer lui-même et dans sa relation aux autres. Dans le champ psychiatrique, le vacillement du moi renvoie essentiellement à la dépersonnalisation, à la déréalisation et à la dissociation, c’est-à-dire à la psychose et notamment la schizophrénie.

Le vacillement du moi est-il transnosographique ou vient-il parler d’une évolution plus profonde du rapport que l’individu entretient avec lui-même et avec le monde ?

Serions-nous devenus « moins stables », voir « instables », et, paradoxalement, plus intéressés par les expériences sensationnelles et exaltantes ?

Comment penser le vacillement au regard des expériences ordinaires et plus extraordinaires ? Si vaciller n’entraîne pas forcément la chute – on pense au Breakdown de Winnicott – peut-on envisager une tendance, voir une quête de ce mouvement qui reposerait paradoxalement sur la fragilisation du sol, individuel et collectif ?

Dans quelle mesure vaciller relève-t-il d’une « capacité négative » ; celle d’un moi capable d’une certaine déformation (qui ne veut pas dire adaptation) pour s’ouvrir à l’autre, qu’il s’agisse d’une pensée nouvelle ou d’une rencontre avec l’inconnu.

Le titre de ce colloque sépare arbitrairement l’idée d’un moi potentiellement soumis à une forme de dérobade à lui-même et celle d’un état – l’amour, la passion – indissociable d’un objet duquel le sujet est captif. Au moi, le vacillement ; à l’amour, le vertige (comme le chantait Bashung). Les choses sont évidemment plus complexes et engagent, de fait, les aléas du tissage entre narcissisme et objet ; entre pulsion de vie et destructivité. Quand elle saisit, la rencontre amoureuse (parfois le coup de foudre) emporte tout sur son passage. À l’autre extrême, les vertiges d’une sexualité sans limites (à l’exemple du Chemsex) semblent relever d’un vacillement radical de l’être qui exclut tout vacillement amoureux. 

À une époque où la psychiatrie et la « santé mentale » visent moins à comprendre ou guérir qu’à « stabiliser », toutes pathologies confondues, que peuvent nous dire la psychanalyse et les sciences sociales de l’idée de vertige et de vacillement ? L’expérience du transfert, sur laquelle repose le processus de la cure, n’est-elle pas, par excellence, celle qui allie vacillement et vertige ? « Vérité d’un genre bizarre » (Winnicott) elle embrasse folie, régression, déséquilibre, processus hallucinatoire, passion haineuse et amoureuse.

 

Intervenants :

Jacques André, Professeur émérite de psychopathologie clinique, Université Paris Cité

Mickael Benyamin, Maître de Conférence de psychopathologie, Université Paris Cité

Anthony Brault, psychologue, psychanalyste en formation (SPRF), Maître de conférences en psychologie clinique et psychopathologie, CRPMS, Université Paris Cité

Fanny Dargent, Psychanalyste, Professeur de psychopathologie clinique, directrice du CRPMS, IHSS, Université Paris Cité.

Alain Ehrenberg, PhD, Directeur de recherche émérite, CNRS, EHESS, INSERM, CERMES3, Centre de Recherche Médecine, Sciences, Santé, Santé Mentale, Société, Université Paris Cité.

Vincent Estellon, Psychanalyste, Psychodramatiste, Professeur de psychopathologie clinique, Université Paris Cité

Alexandre Morel, psychologue, psychanalyste, Département de Psychiatrie Infanto-Juvénile de l’Institut Mutualiste Montsouris, Membre Formateur de l’association ETAP ( Etudes, Traitement et   Analyse par le psychodrame). Professeur associé de psychologie à l’Université Paris-Cité

Thomas Rabeyron, Professeur de psychopathologie clinique, Lyon 2 Lumière.

Caroline Thompson, Docteur en psychopathologie clinique, psychologue, psychanalyste, Service de pédopsychiatrie, hôpital de la pitié Salpêtrière, Paris.

Fernando Urribarri, psychanalyste, membre de l’association psychanalytique argentine, auteur d’une quinzaine d’ouvrages.

Colloque organisé par  LE CRPMS, IHSS, UNIVERSITÉ PARIS CITÉ
Avec le soutien du  Labex Who Am I ?

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