Quand
A partir du mercredi 10 janvier de 16h à 19h
Où
Bibliothèque Jacques Seebacher
Séminaire organisé par A. Kalentzis et N. Verdier (Paris-Saclay)
Programme
Mercredi 10 janvier
Blaise Wilfert (École Normale Supérieure) : Le Droit d’auteur, « organe officiel du bureau de l’Union internationale pour la protection des œuvres littéraires et artistiques » (1888-1919) : de la littérature européenne comme transnationale et comme marché
Le Droit d’auteur, qui fut l’émanation du Bureau de l’Union internationale de la protection intellectuelle, le bureau de l’Union dite de Berne, à l’origine de l’OMPI. Ce périodique « technique », qui se préoccupait d’informer sur les législations du monde entier concernant le droit d’auteur et sa protection, mais aussi d’appuyer les efforts d’une « communauté épistémique » d’écrivains, d’éditeurs, de hauts fonctionnaires, de diplomates, de juristes et de journalistes pour unifier et mondialiser une conception particulière de la propriété intellectuelle, est un observatoire passionnant pour comprendre l’arrière-cour économique, juridique, géopolitique et technique de la « littérature européenne », en la comprenant comme un marché et une transnationale.
Julien Schuh (Université Paris-Nanterre, CSLF) : Réguler collectivement la circulation des textes et des images : protocoles émergents de contrôle des flux de contenus dans les « petites revues » fin-de-siècle
À qui appartiennent les textes et les images qui apparaissent dans les revues à la fin du XIXe siècle, et comment leur circulation est-elle régulée ? Nous nous intéresserons à l’exemple de quelques « petites revues » (en particulier le Mercure de France) de la fin du XIXe siècle, et aux relations entre les acteurs qui les font vivre, pour comprendre la manière dont les flux de contenus (reproduction, citation, mention) sont traités de façon toujours plus normalisée, grâce à des négociations qui se mettent en place de manière plus ou moins intentionnelle par les interactions entre acteurs de ces périodiques. Nous ferons l’hypothèse que les contenus en revue, en particulier dans de petites structures, sont traités comme des sortes de communs. La gestion collective, par le biais de comités rédactionnels, de ces contenus tend à produire des effets d’auctorialité diffuse permettant des réutilisations et des circulations assez libres entre revues — des pratiques mises sous tension par la professionnalisation de ces périodiques et l’institutionnalisation de certains auteurs, qui visent à garder le contrôle de la diffusion de leurs œuvres.
Mercredi 7 février
Nathalie Simonnot (chercheur du ministère de la Culture, directrice du laboratoire de recherche de l’École nationale supérieure d’architecture de Versailles) : « Les revues muséales : un objet de recherche polymorphe »
Les revues muséales forment un domaine de recherche encore lacunaire dû à leur typologie hybride, à la confluence entre revue d’art, revue de technique et revue d’actualité professionnelle. Destinées aux conservateurs des musées, elles rendent compte de l’état des collections, des acquisitions et des aménagements réalisés. À vocation à la fois théorique, pratique et didactique, elles sont un support majeur pour assurer la diffusion de l’actualité muséale. Cette conférence sera centrée sur les revues muséales françaises au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, au moment où les contenus et les formats de ces revues ont évolué pour accompagner le renouveau des musées pendant la Reconstruction. En expérimentant plusieurs formules éditoriales dans un laps de temps parfois très court, ces revues sont passées pour certaines d’un simple bulletin de quelques pages à de véritables revues professionnelles. Cette étude permet de contribuer à une histoire des acteurs, des réseaux professionnels, des expériences muséographiques et de leurs modes de diffusion dans la presse spécialisée. En fournissant quantité d’images d’intérieurs aujourd’hui disparus, ces revues retracent une certaine idée du musée et de ses missions. Petits et grands musées s’y côtoient, quel que soit leur statut, dans un élan général faisant des innombrables contributions des conservateurs qui y publient – plusieurs centaines d’articles et de documents graphiques – un corpus hors du commun pour comprendre l’esprit d’une époque.
Paul Edwards (Université Paris Cité, LARCA) : « Revues photographiques et sociétés photographiques autour de 1900 : la photolittérature, le spectacle et la socialisation »
This paper explains how French photoliterature could appear in the 1890s not only as a crafted, bibliophilic object involving multiple participants but also as an activity of cultural distinction within the socialising practices of provincial photographic societies, in close relation to the ritual of lantern-slide story-telling, at a time immediately preceding the birth of cinema (1895) when there was already an interest in the narrative power of serial photography and what might be called the “kinetic” effect of juxtaposed images on the page. This paper also shows how literary illustrations could double as architectural views that provided documentary evidence of a cultural heritage that was perceived as fragile and in need of preservation, since the members of photo clubs were leisured amateurs who participated actively in different cultural and patrimonial associations. Drawing on local photography club journals, national photography magazines, and recently discovered correspondence, this paper aims to show how photoliterature was collectively produced within a context of bourgeois sociability in a quest for cultural distinction and social recognition at a time when photography was popularly associated with commerce, industry and science, not with fine art and culture; it will show how it forms a continuum with photo-club activities, and that the historical interest of these productions today lies not only in their witty reinterpretations of popular literature, but in what they reveal about photography’s social function.
Mercredi 22 mai
Eleni Stavroulaki (Princeton University, Department of Art and Archaeology), « La Pensée moderne de la Préhistoire. Le cas des Cahiers d’Art (1926-1969) »
Entre 1926 et 1969, Cahiers d’art, la revue et la maison d’édition de Christian Zervos, s’identifie à la défense des courants post-cubistes et à une promotion – au moins dans l’entre-deux-guerres – de l’esthétique rationaliste du purisme et du fonctionnalisme. À côté de ces aspects, Cahiers d’art manifeste une ouverture pour la Préhistoire et les arts extra-occidentaux. C’est ainsi que de récentes recherches ont envisagé la revue, donnant plus de consistance au poids anticlassique de celle-ci. Dans cette intervention je vise à relativiser cette approche longtemps privilégiée, montrant que le récit de Zervos sur les arts pré- et protohistoriques ne s’établit pas sur l’idée d’une rupture évolutive avec l’Antiquité classique, mais au contraire sur celle de temporalités continuistes. Bref, je vais montrer que Zervos a comblé – à la fois sur le plan archéologique et visuel – l’écart entre la préhistoire, la Grèce classique et la production moderne.
The promotion of post-Cubist artists and the rationalist aesthetics of Purism and Functionalism were the main focuses of Christian Zervos’ art magazine and publishing house Cahiers d’art (1926-1969). However, in addition to these aspects, Cahiers d’art also showed a multi-cultural openness covering both non-European cultures and the pre- and protohistoric arts of the Mediterranean. In this context, recent scholarly work often highlighted the journal’s anticlassical stance. In this presentation, I will attempt to relativize this approach, by showing that Zervos’ account of pre- and proto-historic art was not founded on the notion of an evolutionary split and on a univocal anti-classical stance, but rather on the continuity between the classical and deep past. In this way, I will make the case that Zervos bridged – both archaeologically and visually – the gap between prehistory, classical Greece, and modern production.
Jean-Michel Galland (docteur en histoire, École des Chartes) : « Le ‘retour à l’antique’ en France pendant l’entre-deux-guerres au travers des revues d’art et des livres
Il est généralement question, en littérature ou en art, d’un « retour à l’antique » pendant l’entre-deux-guerres, et d’un « retour à l’antique » appréhendé en tant qu’une composante d’un « retour à l’ordre » qui se serait produit à cette période. Nous questionnons précisément ces deux notions de « retour » dans cet exposé dont l’objet est de présenter un panorama et une analyse, textes et images, des recours, pendant l’entre-deux-guerres, à l’antiquité au travers des revues d’art et des livres illustrés publiés en France à cette période. Une présentation rapide est d’abord faite de l’approche choisie pour mener cette recherche, une approche récemment développée sur la base de la théorie des champs du sociologue Pierre Bourdieu. Nous justifions ensuite le choix des neuf revues d’art sélectionnées pour cette étude, telles que L’Esprit nouveau, Les Cahiers d’art ou Minotaure, puis nous décrivons les différentes bases de données établies dans ce cadre. La base couvrant les revues d’art compile et analyse tous les articles ayant trait à l’antiquité gréco-romaine publiés dans ces revues au cours de la période considérée. Nous rendons compte ensuite des résultats de l’exploitation de ces bases en identifiant, pour chacun des quatre secteurs du champ artistique, les formes de recours à l’antique (univers grec ou latin, orientations esthétiques et idéologiques, etc.) véhiculées par les livres illustrés et par les revues « positionnés » sur la zone considérée, dressant ainsi un panorama à travers le champ de ces recours. Nous mettons alors en évidence la cohérence de ce panorama, en montrant que les formes de recours se répartissent dans la structure en concordance avec les valeurs esthétiques et sociétales qui la sous-tendent. Nous montrons également comment cette répartition spatiale s’inscrit dans l’histoire, récente ou plus lointaine, du champ, corroborant ainsi la « loi du changement » observée pour tous les champs culturels. Nous revenons en conclusion sur les notions de « retour à l’antique » et de « retour à l’ordre » pendant l’entre-deux-guerres et sur les raisons de leur succès critique.
In literature and art, we generally talk of a « return to antiquity » during the interwar period, and of a « return to antiquity » understood as part of a « return to order » that occurred during this period. We will examine these two notions of « return » in this presentation, which aims to provide an overview and analysis, in text and image, of the use of antiquity in art magazines and illustrated books published in France between the two wars. We begin with a brief presentation of the approach chosen to conduct this research, an approach recently developed on the basis of sociologist Pierre Bourdieu’s field theory. We then justify the choice of nine art magazines for this study, such as L’Esprit nouveau, Les Cahiers d’art and Minotaure, and describe the various databases established for this purpose. The database covering art magazines compiles and analyzes all articles on Greco-Roman antiquity published in these magazines during the period under. We then report on the results of using these databases, identifying, for each of the four sectors of the artistic field, the forms of recourse to antiquity (Greek or Latin universe, aesthetic and ideological orientations, etc.) conveyed by the illustrated books and magazines « positioned » in the area, thus drawing up a panorama across the field of these recourses. We then highlight the coherence of this panorama, showing that the forms of recourse are distributed throughout the structure in accordance with the aesthetic and societal values that underpin it. We also show how this spatial distribution is part of the field’s recent or more distant history, thus corroborating the « law of change » observed for all cultural fields. In conclusion, we return to the notions of « return to antiquity » and « return to order » during the interwar period, and the reasons for their critical success.
Organisateurs :
Hélène Védrine (Sorbonne Université, CELLF 19-21)
Norbert Verdier (Paris-Saclay, EST-GHDSO)
Alexia Kalantzis (UVSQ, CHCSC et CERILAC, Université Paris Cité)
Comité scientifique :
Jean-Charles Geslot (UVSQ, CHCSC)
Axel Hohnsbein (Université de Bordeaux, SPH)
Alexia Kalantzis (UVSQ, CHCSC & Paris Cité Université, CERILAC)
Catherine Radtka (CNAM PARIS, HT2S)
Viera Rebolledo-Dhuin (UPEC, CRHEC)
Evanghelia Stead (UVSQ, CHCSC)
Hélène Védrine (Paris-Sorbonne, CELLF 19-21)
Norbert Verdier (GHDSO/EST)
Contacts :
alexia.kalantzis@u-paris.fr
norbert.verdier@universite-paris-saclay.fr
Avec le soutien de la MSH Paris-Saclay & du CELLF 19-21
Informations pratiques
Bibliothèque Jacques Seebacher, Université Paris Cité, Campus des Grands Moulins, 5 rue Thomas Mann, 75013 Paris, bâtiment A, 2e étage, 16h-19h
La séance sera accessible également en ligne. Les demandes d’inscription pour la séance en ligne sont à adresser à norbert.verdier@u-psud.fr et alexia.kalantzis@u-paris.fr.
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