L’Institut la Personne en médecine a produit une série de vidéos sur l’éthique du soin au cinéma. Chaque épisode analyse un film où apparaissent les dimensions humaines du soin, trop souvent oubliées. Un travail nécessaire qui associe Céline Lefève, directrice de l’Institut la Personne en médecine, Jean-Michel Frodon, historien et critique cinéma et François Crémieux, directeur général de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Marseille.  

L’éthique, une dimension nécessaire du soin

Le projet de capsules vidéos Éthique du soin au cinéma, porté par Céline Lefève pour l’Institut la Personne en Médecine, s’enracine dans un constat fort. Dans les pratiques professionnelles du soin, il arrive que la dimension humaine demeure hors champ. Didier Sicard, professeur émérite de l’Université Paris Cité, et ancien président du Comité consultatif national d’éthique, étroitement associé au projet, le résume en une formule frappante : « La médecine est une part de l’existence qui peut sauver, quelquefois meurtrir, mais qui est au service de l’humain, et non l’inverse. »

Remettre l’humain au centre du soin, changer le regard des praticiens sur leurs approches, « faire descendre le médecin de son cheval pour se rapprocher de la réalité humaine » comme le dit encore Didier Sicard, voilà l’ambition éthique qui traverse l’ensemble des vidéos.

Le cinéma, un regard humain sur les pratiques de soin

Dans sa représentation des soins, le cinéma ne fait pas l’économie de problématiques qui dépassent le niveau biomédical. Bien souvent, ce sont les dimensions psychiques et sociales qui sont au cœur des intrigues. Dans À tombeau ouvert, le film de Scorsese sorti en 1999, le point de vue est celui d’un ambulancier au bord de la rupture. En 2016, dans La Fille inconnue, les frères Dardenne s’intéressent à l’accessibilité au soin et aux devoirs moraux du médecin. Et ce ne sont que deux exemples parmi les 14 films analysés dans les vidéos.

Le cinéma apparaît alors comme un révélateur. Il donne à voir tout ce qui échappe aux praticiens et aux malades. L’anxiété avant la prise en charge ou pendant la convalescence, le partage des émotions dans les familles, mais aussi les moments de soulagement des patients et des professionnels : tout ce qui se passe hors de la relation médicale peut être montré dans un film. Les gros plans, l’identification à un point de vue, sont autant de techniques propres au cinéma qui conduisent à « un décentrement du regard », ainsi que l’analyse Céline Lefève. Le spectateur est conduit à ressentir ce que vivent les patients, mais aussi les praticiens du soin, alternativement. Ce que les vidéastes sont allés chercher, c’est bien cette capacité du cinéma à restituer toute la complexité du soin dans le jeu des points de vue.

La pluridisciplinarité au service de l’éthique du soin

Pour relever le défi de la complexité, il fallait une équipe pluridisciplinaire. Céline Lefève, professeure de philosophie de l’Université Paris Cité, s’est donc entourée de Jean-Michel Frodon, historien, professeur associé à Sciences Po et critique cinéma pour Slate.fr, ainsi que de François Crémieux, directeur de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Marseille. Les vidéos sont réalisées par Kendra McLaughlin, réalisatrice, ancienne élève de l’École des arts politiques de Sciences Po, ancienne élève du Fresnoy, et doctorante à Harvard.

La qualité de la production et des invités doit être soulignée. À chaque fois, l’équipe s’entoure des spécialistes qui lui permettent de déplier tous les enjeux du film qu’elle analyse – parfois même de la réalisatrice ou du réalisateur. En un passionnant jeu de renvois, les vidéos décortiquent le regard que les cinéastes ont porté sur la relation de soin, pour les analyser. Déconstruction des regards et des jeux de pouvoirs qu’ils impliquent, pour approcher au plus près des personnes.

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