Fréderic Moynier, lauréat de la Médaille de l’engagement de l’Université Paris Cité
Semaine de la santé planétaire
Titulaire d’une Habilitation à Diriger des Recherches (2011) et d’un Doctorat (2006) de l’École normale supérieure (ENS) de Lyon, Frédéric Moynier a suivi une formation d’excellence en sciences de la Terre, débutée au sein du Magistère de l’ENS Lyon en 2002, en tant qu’élève normalien. Après un premier poste de chercheur postdoctorant à l’Université de Californie à Davis (2006-2007), il rejoint Washington University in St. Louis, aux États-Unis, d’abord comme professeur Assistant en 2008 puis associé en 2013. La même année, il intègre l’Université Paris Cité et l’Institut de Physique du Globe de Paris en tant que professeur. Depuis 2013, sa carrière évolue au sein de l’enseignement supérieur et de la recherche en France : il est promu professeur de classe PR1 en 2016, puis obtient les distinctions de CE1 en 2018 et de CE2 en 2022.
Frédéric Moynier est co-responsable du thème de recherche Origines de l’IPGP et travaille au sein de l’équipe de cosmochimie, astrophysique et géophysique expérimentale (CAGE) à l’IPGP. Il développe et utilise des mesures isotopiques de haute précision sur des échantillons extra-terrestres pour étudier la formation et la différenciation des planètes telluriques. En particulier, ses travaux sur les isotopes stables des métaux, tels que le Zn ou le Cu, ont conduit aux premières preuves isotopiques de l’origine de l’appauvrissement par évaporation en volatils de la Lune, lorsque celle-ci était complétement fondue suite à sa formation lors d’un impact géant sur la Terre. Ces mesures isotopiques sont désormais devenues une référence pour étudier l’origine des éléments volatils dans les différents corps du Système solaire.
Frédéric Moynier a reçu plusieurs prix et distinctions pour ses travaux :
2024 – Fellow, American Geophysical Union
2022 – Fellow, Meteoritical Society
2020 – Grand Prix Mme Victor Noury, Académie des Sciences.
2014 – Kuno Lecturer, European Geophysical Union, Vienna
2013 – Médaille Kuno 2013, American Geophysical Union
2012 – Prix Alfred O. Nier 2012, Meteoritical society
2012 – Médaille Houtermans 2012, European association of geochemistry
Responsabilités scientifiques
2022-2024 – ERC Proof of Concept grant
2021-2026 – ERC Consolidator grant
2015-2021 – ERC Starting grant
Depuis 2019 – co-I mission MMX (Analyses des futurs échantillons de Phobos) JAXA
Depuis 2019 – co-I Hayabusa2 (Analyses des échantillons de Ryugu), JAXA
2020-2022 – co-I Mars2020 (Équipe de sélection des échantillons de Mars) NASA
Entretien
Que représente pour vous la médaille de l’engagement de l’Université Paris Cité ?
C’est un grand honneur pour moi d’être reconnu, et en particulier d’être reconnu par des pairs de l’Université. Je suis touché car il s’agit d’une reconnaissance du travail accompli au sein notre laboratoire et de nos recherches dans le domaine très particulier de la cosmochimie – à l’interface de l’astrophysique et des sciences de la terre. Lorsque je suis arrivé à l’université il y a 12 ans dans le cadre de la chaire d’excellence d’USPC, nous avons développé des méthodes uniques qui nous ont permis de comprendre des phénomènes fondamentaux sur la formation des différentes enveloppes de la Terre, de la Lune et des planètes et qui ont aussi pu être appliquées, avec succès, à d’autres domaines, notamment dans le domaine de la santé et de la maladie d’Alzheimer.
Qu’avez-vous apprécié dans votre travail au sein de l’IPGP et de l’Université Paris Cité en particulier ?
Travailler au sein de l’IPGP est une chance car c’est l’un des rares laboratoire de Sciences de la Terre et des Planètes au monde qui soit aussi pluridisciplinaire, au sein duquel on retrouve toutes les spécialités à un aussi haut niveau comme la géochimie, la géophysique, la géologie, la géobiologie ou la planétologie. Cette pluridisciplinarité favorise des échanges et des interactions de très haut niveau entre les différents laboratoires, ce qui est propice à la recherche. Pour moi, cela m’a permis d’étendre mes méthodes à d’autres questions scientifiques. C’est une chance unique. Lorsque je suis arrivé il y a douze ans, nous avons créé un groupe multidisciplinaire avec un astrophysicien, des cosmochimistes, des géochimistes, des spécialistes de la physique des minéraux et nous avons maintenant un chimiste théorique. Nous avons également noué des liens avec des laboratoires de la faculté de Santé à Bichat et Lariboisière afin de développer des applications biomédicales de nos mesures isotopiques en particulier sur la maladie d’Alzheimer et plus récemment avec un laboratoire de Pasteur sur des questions de vie primitive.
J’aime explorer de nouveaux domaines, essayer de nouvelles approches et de nouvelles pistes. L’université encourage à dépasser les clivages entre les domaines, les disciplines ainsi qu’entre établissements et favorise une discussion permanente.
Quels ont été les moments les plus marquants de votre carrière ?
J’ai eu la chance de faire une thèse dans le domaine de la cosmochimie, sur des méthodes qui étaient alors inédites, ce qui m’a permis de décrocher rapidement un poste de professeur aux États-Unis. Cela été une expérience à la fois exigeante et unique de pouvoir, à 29 ans, diriger un laboratoire dans une université américaine. Mon retour en France, à l’Université Paris Diderot, s’est fait dans de très bonnes conditions : grâce au financement IdEx, j’ai été l’un des premiers titulaires d’une chaire d’excellence. L’IUF et ERC ont également été de formidables reconnaissances et tremplins pour développer mon laboratoire.
Travailler au sein de l’Université Paris Cité apporte une dimension supplémentaire en matière de recherche. Je suis entouré de collègues remarquables et soutenu par une par une équipe technique et administrative remarquable. J’ai toujours eu la chance d’encadrer d’excellents étudiants de masters, doctorants et post-doctorants dont les contributions ont été essentielles dans notre réussite collective. De plus, il y a une interaction permanente avec la société (par exemple dans le cadre de conférences grand public), ce qui nous oblige à réfléchir différemment et à expliquer le sens et l’importance de nos travaux.
Vos projets pour la suite ?
Dans le domaine de la cosmochimie, l’avenir proche c’est en particulier l’analyse des échantillons de la face cachée de la Lune ramenés par la sonde chinoise Chang’E 6 (lancée le 3 mai 2024). D’ici 4 ans, il y aura ensuite les retours d’échantillons de la Mission MMX (mission japonaise) qui ramènera des échantillons de Phobos, une lune de Mars, puis d’ici 10 ans, le retour d’échantillons de Mars (missions chinoise et américaine).