Le bon fonctionnement du microbiote intestinal a un impact sur la santé générale, physique et psychologique. Comprendre comment l’architecture du microbiote et la fonction des bactéries qui l’habitent influent sur l’organisme est devenu un axe de recherche essentiel ces dernières années. Dans ce contexte, des chercheurs et chercheuses de l’Inserm et d’Université Paris Cité, en collaboration avec des équipes d’INRAE, de l’Imperial College à Londres et de l’université de Copenhague au Danemark ont montré qu’un métabolite issu des bactéries intestinales, l’hippurate, est associé à la diversité du microbiote. Il jouerait un rôle important pour la santé cardiovasculaire et métabolique, notamment en participant à la régulation de la glycémie.

Les cellules bêta des îlots de Langerhans du pancréas sont celles qui produisent l’insuline. Lors d’un diabète de type 1 les cellules ß sont détruites par le système immunitaire. Dans cette étude, l’administration d’hippurate améliore l’équilibre glycémique et stimule la sécrétion d’insuline dans des modèles animaux.

© Inserm/U845/UMRS975/EndoCells SARL

Depuis plusieurs années, on prête un rôle déterminant au microbiote intestinal pour notre santé. De nombreux travaux scientifiques ont souligné qu’il existe un lien entre la diversité des souches de bactéries qui y sont présentes et certains paramètres de santé, notamment cardiovasculaire et métabolique.

L’équipe dirigée par le chercheur Dominique Gauguier s’est intéressée à l’hippurate, un métabolite produit par les bactéries intestinales que l’on retrouve dans les urines.

Les scientifiques ont combiné deux méthodes, le séquençage ADN (analyse du profil génétique) des bactéries du microbiote intestinal et le profilage métabolomique urinaire (analyse de petits métabolites présents dans les urines), chez 271 personnes d’une cohorte danoise (l’étude MetaHIT).  

À partir des données obtenues, les scientifiques montrent que des niveaux élevés d’hippurate dans les urines sont associés à une plus grande diversité de la flore intestinale et une augmentation de la richesse en gènes du microbiote, qui sont deux paramètres protecteurs du risque cardiométabolique (risque de développer des maladies cardiovasculaires et/ou du diabète).

Les chercheurs disposaient par ailleurs d’informations relatives aux habitudes alimentaires des participants, ainsi qu’à leur indice de masse corporelle (IMC). Ils ont constaté que chez les personnes obèses ayant une alimentation riche en graisses saturées, et un risque de développer des problèmes cardiovasculaires et métaboliques, des niveaux élevés d’hippurate avaient des effets bénéfiques sur le poids et sur la santé métabolique.

Ces résultats ont été complétés par une étude de validation chez des souris obèses, nourries avec un régime gras. Dans ces modèles animaux, l’administration d’hippurate améliorait l’équilibre glycémique et stimulait la sécrétion d’insuline. « Ces travaux confirment l’importance de l’architecture et de la fonction de la flore intestinale en santé humaine, en démontrant le rôle bénéfique d’un métabolite produit par des bactéries intestinales, comme nous l’avions déjà démontré précédemment avec un autre métabolite, le cresol », souligne Dominique Gauguier.

L’intérêt de ces résultats est à la fois diagnostique, l’hippurate pouvant être considéré comme un biomarqueur de la diversité du microbiote, mais aussi thérapeutique.

En effet, il serait envisageable par exemple de modifier le microbiote avec des systèmes probiotiques produisant en plus grande quantité les bactéries intestinales qui synthétisent les précurseurs de l’hippurate. Cela permettrait ensuite d’augmenter les niveaux d’hippurate avec des effets protecteurs sur le risque cardiométabolique.

Pour les chercheurs, la prochaine étape serait de poursuivre ces travaux en étudiant les mécanismes cellulaires permettant d’expliquer comment l’hippurate favorise la sécrétion de l’insuline et la régulation de la glycémie.

Références

Human and preclinical studies of the host–gut microbiome co-metabolite hippurate as a marker and mediator of metabolic health

François Brial,1 Julien Chilloux,2 Trine Nielsen,3 Sara Vieira-Silva,4 Gwen Falony,4 Petros Andrikopoulos,2,5 Michael Olanipekun,2,5 Lesley Hoyles,6 Fatima Djouadi,7,8 Ana L Neves,2 Andrea Rodriguez-Martinez,2 Ghiwa Ishac Mouawad,1 Nicolas Pons,9 Sofia Forslund,10 Emmanuelle Le-chatelier,9 Aurélie Le Lay,1 Jeremy Nicholson,2 Torben Hansen,3 Tuulia Hyötyläinen,11 Karine Clément,12,13 Matej Oresic,14 Peer Bork,15 Stanislav Dusko Ehrlich,9,16 Jeroen Raes,4,17 Oluf Borbye Pedersen,3 Dominique Gauguier,1,18 Marc-Emmanuel Dumas2,5,18,19

  • 1 UMRS 1124 Inserm, Université Paris Cité , Paris, France

  • 2 Section of Biomolecular Medicine, Department of Metabolism, Digestion and Reproduction, Imperial College London, London, UK

  • 3 Novo Nordisk Foundation Centre for Basic Metabolic Research, University of Copenhagen, Kobenhavn, Denmark

  • 4 Laboratory of Molecular Bacteriology, Department of Microbiology and Immunology, Rega Institute for Medical Research, Katholieke Universiteit Leuven, Leuven, Belgium

  • 5 National Heart & Lung Institute, Section of Genomic & Environmental Medicine, Imperial College London, London, UK

  • 6 Department of Biosciences, Nottingham Trent University, Nottingham, UK

  • 7 Centre de Recherche des Cordeliers, Université Paris Cité, Paris, France

  • 8 Centre de Recherche des Cordeliers, INSERM, Sorbonne Université, Paris, France

  • 9 Metagenopolis, INRAE, Paris, Île-de-France, France

  • 10 Forslund Lab, Max Delbrück Centrum für Molekulare Medizin Experimental and Clinical Research Center, Berlin, Berlin, Germany

  • 11 Department of Chemistry, Örebro University, Örebro, Sweden

  • 12 Inserm, U1166, team 6 Nutriomique, Université Pierre et Marie Curie-Paris 6, Paris, France

  • 13 Institute of Cardiometabolism and Nutrition (ICAN), Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Pitié-Salpêtrière Hospital, Paris, France

  • 14 School of Medical Sciences, Örebro Universitet, Orebro, Sweden

  • 15 Structural and Computational Biology Unit, European Molecular Biology Laboratory, Heidelberg, Germany

  • 16 Center for Host Microbiome Interactions, King’s College London Dental Institute, London, UK

  • 17 Center for Microbiology, Vlaams Instituut voor Biotechnologie, Leuven, Belgium

  • 18 McGill Genome Centre & Department of Human Genetics, McGill University, Montréal, Québec, Canada

  • 19 European Genomics Institute for Diabetes,Inserm U1283, CNRS UMR8199, Institut Pasteur de Lille, Lille University Hospital, Unversity of Lille, Lille, France

 

DOI: https://gut.bmj.com/content/early/2021/05/11/gutjnl-2020-323314

 
 

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