L’encéphalite est une inflammation aiguë du tissu cérébral qui affecte enfants et adultes, particulièrement présente en Asie du Sud-Est. Les chercheurs et médecins impliqués dans le projet « South East Asia encephalitis » (SEAe), coordonné par l’Institut Pasteur (Paris), en collaboration avec le Pasteur Network, ont montré l’importance de la prévention et de la prise en charge rapide et adaptée des patients atteints d’encéphalite. Les résultats suggèrent notamment que la vaccination contre l’encéphalite japonaise pourrait, à elle seule, diminuer d’un tiers sa prévalence.

Hôpital Pédiatrique de Yangon, Birmanie Les médecins analysent les résultats du scanner cérébral d’un jeune patient souffrant d’encéphalite.
© Institut Pasteur / Pyay Kyaw Myint
L’encéphalite est une inflammation qui peut se manifester suite à une infection du parenchyme cérébral, le tissu fonctionnel du cerveau, ou encore suite à une atteinte auto-immune. Elle pose un problème de santé publique mondial en raison de son taux élevé de mortalité et des séquelles neurologiques qu’elle entraine. Ses causes restent cependant fréquemment inconnues. En cas d’infection, les virus sont les plus fréquents mais d’autres agents pathogènes peuvent en être responsables.
Le Consortium « South East Asia encephalitis » (SEAe) qui regroupe médecins et chercheurs d’Asie du Sud-Est et d’Europe, a conduit la plus grande étude prospective multicentrique sur l’encéphalite infantile en Asie du Sud-Est. Cette étude a consisté en un système de diagnostic harmonisé dans quatre hôpitaux référents chacun présent au Cambodge, au Laos, au Vietnam et au Myanmar. Le système utilisé comportait trois étapes successives afin d’identifier rapidement les agents pathogènes les plus couramment rencontrés et pour lesquels existe un traitement, identifier d’autres agents pathogènes connus, et enfin explorer d’autres diagnostics pour tenter de mettre en évidence des agents pathogènes inconnus.
Parmi les 694 enfants pris en charge, 664 présentaient une encéphalite. Une cause a été identifiée dans 64% des cas. La cause la plus fréquente était l’infection au virus de l’encéphalite japonaise (33 % des patients). Les scientifiques ont également identifié des cas associés à une infection au virus de la dengue, de la grippe, au virus herpès simplex 1, au bacille tuberculeux, au pneumocoque, à l’entérovirus 71, à d’autres agents infectieux (avec plus de 30 pathogènes identifiés), et à une origine auto immune. Parmi toutes les causes identifiées, 18% sont traitables et 42% auraient pu être prévenues par vaccination.
Au terme de leur séjour à l‘hôpital, 13% des enfants étaient décédés, 23% présentaient des séquelles neurologiques sévères, 30% avaient des séquelles neurologiques légères ou modérées, et 34% aucune séquelle. Les facteurs de risque de décès ou de séquelles neurologiques sévères étaient liés à la tuberculose méningée, la présence d’une atteinte respiratoire avec besoin en oxygène, la présence d’un coma prolongé, et à un retard de prise en charge.
« Les données générées par cette étude permettront d’aider à l’élaboration de recommandations de prise en charge de l’encéphalite pour la région du Grand Mékong sur les plans diagnostic et préventif. Elles soulignent l’importance des campagnes nationales de vaccination massive ciblant notamment le virus de l’encéphalite japonaise. » indique Marc Lecuit, (Université Paris Cité et hôpital Necker-Enfants malades AP-HP), responsable de l’unité de Biologie des infections à l’Institut Pasteur (Université Paris Cité, Inserm) et co-coordinateur de l’étude.
Références
Childhood encephalitis in the Greater Mekong region (the SouthEast Asia Encephalitis Project): a multicentre prospective study, The Lancet Global Health, 14 juin 2022
Jean-David Pommier*, Chris Gorman*, Yoann Crabol*, Kevin Bleakley, Heng Sothy, Ky Santy, Huong Thi Thu Tran, Lam Van Nguyen, Em Bunnakea, Chaw Su Hlaing, Aye Mya Min Aye, Julien Cappelle, Magali Herrant, Patrice Piola, Bruno Rosset, Veronique Chevalier, Arnaud Tarantola, Mey Channa, Jerome Honnorat, Anne Laure Pinto, Sayaphet Rattanavong, Manivanh Vongsouvath, Mayfong Mayxay, Sommanikhone Phangmanixay, Khounthavy Phongsavath, Ommar Swe Tin, Latt Latt Kyaw, Htay Htay Tin, Kyaw Linn, Thi Mai Hung Tran, Philippe Pérot, Nguyen Thi Thu Thuy, Nguyen Hien, Phuc Huu Phan, Philippe Buchy, Philippe Dussart, Denis Laurent, Marc Eloit†, Audrey Dubot-Pérès†, Olivier Lortholary†, Xavier de Lamballerie†, Paul N Newton†, Marc Lecuit†#, on behalf of the SEAe Consortium
*Premiers auteurs conjoints / †Auteurs principaux conjoints / # Auteur correspondant
DOI : https://doi.org/10.1016/S2214-109X(22)00174-7
À lire aussi

Découverte d’un circovirus impliqué dans une hépatite humaine
Espèce encore inconnue de circovirus, provisoirement nommée Human Circovirus 1, il est nouveau et distant des circovirus animaux connus. Son rôle a été démontré dans les dommages au foie d’une patiente sous traitement immunodépresseur.

Des fractures au sein des tissus cellulaires : un rôle clé de la rigidité du substrat
À leur surprise, et alors que les cellules épithéliales continuent de se diviser pour former une fine couche de tissu protecteur pour les organes, les chercheurs ont montré que des fractures apparaissent et disparaissent spontanément au sein du tissu épithélial et que ces fractures dépendent de la rigidité du substrat.

L’exposition alimentaire aux nitrites associée à un risque accru de diabète de type 2
Plus de 15 000 produits emballés sur le marché français contiennent actuellement des nitrites et ou des nitrates. Fréquemment utilisés pour garantir une meilleure conservation des viandes transformées (jambons, saucissons…), l’innocuité de ces additifs alimentaires fait cependant l’objet de débats.

Covid-19 : des défauts génétiques responsables du syndrome inflammatoire multi-systémique de l’enfant
L’équipe du laboratoire de génétique humaine des maladies infectieuses de l’hôpital Necker-Enfants malades AP-HP, d’Université Paris Cité, de l’Inserm, au sein de l’Institut Imagine, à la tête du consortium international COVID Human Genetic Effort (www.covidhge.com)...