Les maladies cardiovasculaires sont la principale cause de mortalité en Europe occidentale, représentant 1/3 des décès en 2019. L’alimentation serait responsable d’environ 30 % des décès dus aux maladies cardiovasculaires. Les politiques nutritionnelles de prévention constituent donc un enjeu de santé publique majeur pour ces pathologies. Dans un article paru dans le Lancet Regional Health-Europe, des chercheurs de l’Équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle CRESS-EREN), équipe mixte de l’Inserm, d’INRAE, du Cnam, de l’Université Sorbonne Paris Nord et de l’université Paris Cité, en collaboration avec des chercheurs du Centre international de recherche sur le cancer (OMS-CIRC), rapportent un risque accru de maladies cardiovasculaires associé à la consommation d’aliments moins bien classés sur l’échelle du Nutri-Score (nouvelle version 2024), au sein de la cohorte européenne EPIC. Au total, 345 533 participants de la cohorte, répartis dans 7 pays d’Europe et suivis pendant 12 ans ont été inclus dans les analyses.
© Mathilde Touvier
Le Nutri-Score est désormais bien connu et largement plébiscité[1] par les Français. Officiellement adopté en France en 2017 (et dans 6 autres pays européens depuis), ce logo vise à fournir une information rapide sur la qualité nutritionnelle des aliments et boissons pour aider les consommateurs à les comparer entre eux et les inciter à choisir ceux présentant la meilleure qualité nutritionnelle. En parallèle, il permet d’encourager les industriels à améliorer la qualité nutritionnelle de leurs produits.
Le Nutri-Score comporte 5 catégories : de A-vert foncé (qualité nutritionnelle plus élevée) à E-orange foncé (qualité nutritionnelle moindre). Une catégorie est attribuée à un aliment ou une boisson en fonction d’un algorithme calculé à partir de sa composition pour 100 g en énergie, sucres, acides gras saturés et sel (à limiter) et en protéines, fruits, légumes et légumineuses (à favoriser).
De nombreuses études publiées dans des journaux scientifiques internationaux (plus de 140 publications) ont démontré la validité du Nutri-Score pour caractériser la qualité nutritionnelle des aliments ou encore son efficacité pour aider les consommateurs à choisir des produits de meilleure qualité nutritionnelle. En particulier, des liens entre la consommation d’aliments moins bien classés sur l’échelle du Nutri-Score (qualité nutritionnelle moindre) et un risque accru de maladies cardiovasculaires ont jusqu’ici été observés dans des études françaises (cohortes SU.VI.MAX et NutriNet-Santé). Des études conduites en France, au Royaume-Uni, en Espagne et en Italie ont également observé des associations similaires avec un risque accru pour diverses pathologies chroniques ainsi qu’une mortalité accrue.
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs se sont intéressés à la nouvelle version de l’algorithme qui sous-tend le Nutri-Score (actualisé en 2024, voir encadré), en lien avec le risque de maladies cardiovasculaires, dans une large population répartie dans 7 pays d’Europe, dans l’objectif de fournir de nouveaux éléments scientifiques pour la validation du Nutri-Score à une échelle européenne. Elle fait suite à deux études publiées en 2018 et en 2020 dans la même population et portant sur le risque de cancer et sur la mortalité.
Au total, 345 533 participants de la cohorte EPIC (European Prospective Investigation into Cancer and Nutrition) ont été inclus dans les analyses. Au cours du suivi (12 ans, entre 1992 et 2010), 16 214 participants ont développé une maladie cardiovasculaire (dont 6 565 infarctus du myocarde et 6 245 accidents vasculaires cérébraux ou AVC). Les résultats montrent que les participants consommant en moyenne plus d’aliments moins bien notés sur l’échelle du Nutri-Score, reflétant une moins bonne qualité nutritionnelle, présentaient un risque accru de maladies cardiovasculaires et en particulier d’infarctus du myocarde et d’AVC. Ces associations étaient significatives après la prise en compte d’un grand nombre de facteurs sociodémographiques et liés au mode de vie.
« Ces résultats, combinés à l’ensemble des données disponibles concernant le Nutri-Score et l’algorithme qui le sous-tend, confirment la pertinence du Nutri-Score en tant qu’outil de santé publique pour guider les consommateurs dans leurs choix alimentaires dans une optique de prévention des maladies chroniques », souligne Mélanie Deschasaux-Tanguy, chargée de recherche Inserm.
« Enfin, ces résultats fournissent des éléments clés pour soutenir l’adoption du Nutri-Score comme logo nutritionnel obligatoire en Europe », explique Mathilde Touvier, directrice de recherche à l’Inserm.
Une nouvelle version du Nutri-Score en 2024 : Des modifications de calcul du Nutri-Score[1] ont récemment été proposées par le comité scientifique international en charge de son suivi pour améliorer sa cohérence avec les recommandations nutritionnelles. Cette nouvelle version du Nutri-Score doit entrer en vigueur en 2024 avec un déploiement progressif dans les mois suivants. Toutefois, l’application du Nutri-Score sur les emballages reste optionnelle du fait de la réglementation européenne sur l’étiquetage et repose donc sur la volonté des industriels de l’agroalimentaire. Si, à ce jour, de nombreuses entreprises et marques (plus de 1400 en France) se sont engagées à mettre en place le Nutri-Score sur leurs produits, une harmonisation au niveau européen est nécessaire pour que soit instauré de manière obligatoire un seul logo efficace et utile pour les citoyens. Cette harmonisation est prévue dans le cadre de la stratégie Farm to Fork de la Commission européenne.
[1] https://theconversation.com/en-2024-le-nutri-score-evolue-pourquoi-et-que-faut-il-en-retenir-221697
Référence
Nutritional quality of diet characterized by the Nutri-Score profiling system and cardiovascular disease risk: a prospective study in 7 European countries
The Lancet Regional Health – Europe
DOI : 10.1016/j.lanepe.2024.101006
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