Le paludisme pendant la grossesse représente un problème de santé publique majeur dans les régions où la maladie est endémique, augmentant de manière substantielle les risques pour la santé de la mère et de l’enfant à naître. La pathologie est notamment associée à un faible poids de naissance pour le bébé et à un sur-risque de mortalité néonatale. Pour protéger cette population, une équipe de chercheurs Inserm et Université Paris Cité dirigée par Benoît Gamain, directeur de recherche CNRS, développe un vaccin à l’Institut national de transfusion sanguine. Baptisé PRIMVAC, celui-ci a fait l’objet d’un essai clinique pour étudier la tolérance au vaccin et obtenir des données préliminaires sur sa capacité à induire une réponse immunitaire adaptée. Les résultats de cet essai clinique promu par l’Inserm sont publiés dans la prestigieuse revue Lancet Infectious Diseases.

Le paludisme gestationnel est associé à un faible poids de naissance pour le bébé et à un sur-risque de
mortalité néonatale.
 
Crédits : Benoît Gamain.

L’Organisation mondiale de la santé estime que le paludisme est responsable de plus de 400 000 décès chaque année. Si la lutte contre la maladie a progressé au cours des dernières décennies, certaines populations restent particulièrement vulnérables. C’est le cas des femmes enceintes.

Dans les régions du monde où le paludisme est endémique, les individus acquièrent une immunité contre la maladie tout au long de l’enfance. Lorsqu’ils atteignent l’âge adulte, ils sont donc généralement protégés contre les conséquences les plus graves du paludisme. Les femmes enceintes font néanmoins figure d’exception, car les globules rouges infectés par le parasite Plasmodium falciparum à l’origine du paludisme s’accumulent au niveau du placenta, favorisant l’anémie et l’hypertension maternelle. La maladie est aussi associée à un risque plus élevé de fausses couches spontanées, d’accouchements prématurés et de retards de croissance intra-utérin qui induisent une insuffisance pondérale à la naissance et un taux de mortalité infantile important. En Afrique Sub-Saharienne, 11 millions de femmes enceintes ont ainsi été infectées par le paludisme en 2018. Elles ont donné naissance à près de 900 000 enfants en insuffisance pondérale.

C’est pour lutter contre ce fléau sanitaire qu’une équipe de chercheurs Inserm et Université Paris Cité menée par le directeur de recherche CNRS Benoît Gamain travaille depuis vingt ans au développement d’un vaccin contre le paludisme gestationnel. Celui-ci a pour objectif de prévenir jusqu’à 10 000 décès maternels et 200 000 décès infantiles par an. « Développer un vaccin efficace à destination des jeunes femmes avant leur première grossesse est une priorité afin de réduire la mortalité liée au paludisme. La stratégie vaccinale efficace pourrait cibler une population similaire à celle ciblée par la vaccination HPV par exemple, avant le premier rapport sexuel », souligne Benoît Gamain.

Un vaccin sûr et efficace

Baptisé PRIMVAC, le vaccin avait récemment été produit en grande quantité conformément à la réglementation en vigueur. Dans un essai clinique publiée dans Lancet Infectious Diseases, les chercheurs apportent à présent des données sur la sécurité du vaccin et sur sa capacité à induire une réponse immunitaire adaptée, jusqu’à 15 mois après la vaccination initiale.

Le vaccin a été évalué chez 68 femmes non enceintes âgées de 18 à 35 ans à Paris au centre d’investigation clinique Cochin Pasteur puis au Burkina Faso au Centre national de recherche et de formation sur le paludisme à Ouagadougou. Les participantes ont été réparties et randomisées en 4 cohortes, recevant le vaccin à différentes doses, à 3 reprises sur une période de 3 mois. Ces femmes ont ensuite été suivies pendant 15 mois afin d’identifier et de prendre en charge d’éventuels effets indésirables et d’étudier la réponse immunitaire induite par la vaccination.

Les résultats de cette étude montrent que le vaccin PRIMVAC est bien toléré. Par ailleurs, la capacité du vaccin à produire une réponse immunitaire est avérée, avec une production d’anticorps chez 100 % des femmes vaccinées après seulement deux injections. Les anticorps produits sont capables de reconnaître l’antigène parasitaire à la surface des globules rouges infectés et d’inhiber leur capacité adhésive responsable de leur accumulation dans le placenta, ce qui est crucial pour lutter contre cette forme gestationnelle du paludisme.

« Nous avons pu montrer que le vaccin est bien toléré, à toutes les doses testées. Les effets indésirables relevés concernent principalement des douleurs au site d’injection. Par ailleurs, nous avons mis en évidence que la quantité d’anticorps générés par le vaccin augmente après chaque vaccination et que ceux-ci persistent pendant plusieurs mois. Il semble donc que le vaccin ait une capacité à déclencher une réponse immunitaire durable et potentiellement protectrice », souligne Benoît Gamain.

Etudier cette réponse immunitaire à plus long terme et la protection associée fera l’objet de futurs essais cliniques. Les chercheurs veulent notamment continuer à suivre les 50 volontaires burkinabées afin d’évaluer si cette réponse immune induite par la vaccination se maintient jusqu’à leur première grossesse.

 

Sources
PRIMVAC vaccine adjuvanted with Alhydrogel or GLA-SE to prevent placental malaria: a first-in-human, randomised, double-blind, placebo-controlled study
Lancet Infectious Diseases, Février 2020
DOI : https://doi.org/10.1016/S1473-3099(19)30739-X

Contact chercheur
Benoît Gamain, directeur de recherche CNRS UMR-S 1134, Inserm/Université Paris Cité Tel : +33 (0)1 44 49 31 47 E.mail: benoit.gamain@inserm.fr

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