En cas d’insuffisance rénale, la transplantation est le traitement de choix. Toutefois, le risque de rejet demeure important. Une meilleure compréhension de la réponse immunitaire lors du rejet de greffe rénale – et notamment du phénomène d’inflammation microvasculaire – pourrait contribuer à une meilleure prise en charge diagnostique et thérapeutique des patients. Une étude menée par des chercheurs et chercheuses de l’Inserm, de l’AP-HP et de l’université Paris Cité[1], en collaboration avec des partenaires internationaux, a caractérisé pour la première fois des nouvelles formes de rejet de greffe rénale et leur impact sur la survie à long terme des greffons rénaux. Les résultats sont publiés le 24 octobre dans la revue New England Journal of Medicine (NEJM).
© Université Paris Cité
La transplantation rénale est le traitement de choix pour les patients atteints d’insuffisance rénale terminale, mais son succès à long terme est compromis par le rejet, principale cause de perte des greffons. L’inflammation microvasculaire, un indicateur clé de la réponse immunitaire lors du rejet de greffe rénale, représente un défi majeur pour les cliniciens. Ce phénotype, encore très peu caractérisé, peut se manifester dans des contextes cliniques variés, rendant la prise en charge diagnostique et thérapeutique des patients particulièrement complexe.
Dans une vaste étude internationale[1] coordonnée par Alexandre Loupy, professeur à l’université Paris Cité, néphrologue dans le service de néphrologie-transplantation rénale adultes de l’hôpital Necker-Enfants malades (AP-HP) et directeur de l’Institut de Transplantation et de Régénération d’Organes de Paris – PITOR de l’université Paris Cité), incluant 16 000 biopsies réalisées chez 7000 patients greffés rénaux dans 30 centres de référence répartis dans 7 pays en Europe et en Amérique du Nord, les chercheurs et chercheuses ont caractérisé pour la première fois des nouvelles formes de rejet de greffe rénale et leur impact sur la survie à long terme des greffons rénaux.
Cette collaboration internationale a en effet permis de constituer une vaste cohorte de patients, inédite par son niveau de caractérisation et de précision, intégrant des données cliniques, biologiques, immunologiques et histologiques. Grâce à cette cohorte unique, les chercheurs ont découvert que les patients transplantés rénaux présentant une inflammation microvasculaire avaient un risque accru de progression de la maladie et de perte du greffon rénal à long terme.
Ces résultats montrent que la prise en compte de l’inflammation microvasculaire du greffon rénal permet une meilleure stratification du risque. Ils apportent également de nouvelles perspectives sur des formes de rejet jusqu’ici peu reconnues, ouvrant ainsi la voie à une prise en charge optimisée des patients par un diagnostic de précision et des thérapeutiques immunosuppressives adaptées.
« Notre étude fournit des preuves essentielles montrant que l’inflammation microvasculaire est un indicateur clé d’une évolution défavorable des greffons rénaux à long terme », déclare le Dr Marta Sablik (doctorante à l’Inserm, PITOR), co-première auteure de l’étude. « Ces résultats soulignent l’importance d’une meilleure compréhension de l’inflammation microvasculaire rénale afin d’améliorer la précision diagnostique et les approches thérapeutiques », ajoute le Dr Aurélie Sannier, pathologiste dans le service d’anatomie et cytologie pathologiques de l’hôpital Bichat – Claude-Bernard (AP-HP) et chercheuse au sein de l’institut PITOR, également co-première auteure de l’étude.
La cohorte unique constituée dans le cadre de cette recherche reflète la diversité des pratiques cliniques à travers plusieurs pays, renforçant ainsi la portée des résultats et leur potentiel à influencer les soins en transplantation au niveau mondial. L’intégration de ces nouveaux phénotypes dans le diagnostic du rejet ouvre la voie à la standardisation des futurs essais cliniques, visant à élucider les processus immunologiques sous-jacents et à définir des stratégies thérapeutiques personnalisées.
« Cette recherche représente une avancée majeure en médecine de la transplantation rénale, pour une prise en charge optimisée des patients. Par ailleurs, ces résultats ouvrent des voies significatives pour mieux élucider les mécanismes du rejet d’organes avec des retombées dans d’autres domaines tels que la greffe cardiaque, hépatique, pulmonaire, de tissu composite ainsi qu’en xénotransplantation où notre équipe a récemment démontré des mécanismes similaires de rejet impliquant la microcirculation », déclare le Professeur Alexandre Loupy.
Cette étude met aussi en évidence la nécessité de projets d’envergure pour favoriser l’innovation dans la prise en charge et le suivi des patients transplantés, alors que l’amélioration de la survie des greffons est essentielle pour relever le défi mondial de la pénurie d’organes.
[1] Ce projet a été conduit par un consortium de chercheurs de l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Inserm), de l’AP-HP et de l’Université Paris Cité, sous la direction du Professeur Alexandre Loupy de l’Institut de Transplantation et de Régénération d’Organes de Paris (PITOR). Ces travaux ont été permis grâce au soutien de l’ANR (étude KTD-Innov, ANR-17-RHUS-0010) ainsi que des programmes européens Horizon 2020 (étude EU-TRAIN, 754995) et ERC Consolidator Grant (AI-Care, 101126272).
[2] NCT06496269
Référence
Microvascular Inflammation of Kidney Allografts and Clinical Outcomes
Marta Sablik*, Aurélie Sannier*, Marc Raynaud#, Valentin Goutaudier#, Gillian Divard, Brad C. Astor, Patricia Weng, Jodi Smith, Rouba Garro, Bradley A. Warady, Rima S. Zahr, Katherine Twombley, Vikas R. Dharnidharka, Raja S. Dandamudi, Marc Fila, Edmund Huang, Anne-Laure Sellier-Leclerc, Burkhard Tönshoff, Marion Rabant, Jérôme Verine, Arnaud del Bello, Thierry Berney, Olivia Boyer, Rusan Ali Catar, Richard Danger, Magali Giral, Daniel Yoo, François Girardin, Alaa Alsadi, Pierre-Antoine Gourraud, Emmanuel Morelon, Moglie Le Quintrec, Mélanie Try, Jean Villard, Weixiong Zhong, Oriol Bestard, Klemens Budde, Bertrand Chauveau, Lionel Couzi, Sophie Brouard, Julien Hogan, Christophe Legendre, Dany Anglicheau, Olivier Aubert, Nassim Kamar, Carmen Lefaucheur, Alexandre Loupy
New England Journal of Medicine, 24 octobre 2024
À lire aussi
Kristel Chanard reçoit la médaille de bronze du CNRS
Kristel Chanard, géophysicienne de l’IGN dans l’équipe de géodésie de l’IPGP, est médaillée de bronze 2024 du CNRS. La médaille de bronze récompense les premiers travaux consacrant des chercheurs et des chercheuses spécialistes de leur domaine. Cette distinction...
lire plusVers une meilleure compréhension des cancers hématologiques associés à la grossesse
Les équipes des départements d’hématologie clinique et biologique, de gynécologie obstétrique, de pharmacovigilance, de réanimation médicale, d’infectiologie, ainsi que de l’unité de recherche clinique de l’hôpital Cochin-Port Royal AP-HP, de l’université Paris Cité,...
lire plusDépression : un dysfonctionnement de certains neurones de l’amygdale serait à l’origine de la perception négative de l’environnement
La dépression se caractérise, entre autres, par une tendance à percevoir de façon excessivement négative les stimuli sensoriels et les situations de la vie quotidienne. Des chercheurs de l’Institut Pasteur et du CNRS, en collaboration avec des psychiatres du GHU Paris...
lire plusMa Thèse en 180s : Prolongation des inscriptions jusqu’au 30 octobre soir
Les inscriptions au concours sont prolongées jusqu’au 30 octobre au soir !
lire plus