En imageant pour la première fois à haute résolution et en 3D le système magmatique sous la dorsale est-Pacifique, une équipe internationale dirigée par Milena Marjanovic, chercheuse CNRS à l’Institut de physique du globe de Paris, met en lumière la morphologie des lentilles magmatiques, dernières étapes du magma avant les éruptions de lave en surface.
L’étude, parue le 29 septembre dans la revue Science Advances, montre que la forme de ces petits réservoirs magmatiques garde en mémoire les processus de rechargement et d’expulsion du magma, influant sur la dynamique des éruptions à venir.

Les images sismiques à haute résolution éclairent l’architecture à petite échelle du réseau de corps magmatiques superficiels.

© Marjanovic – CNRS-IPGP

Les modèles volcaniques montrent que l’architecture des systèmes de plomberie magmatique entre le manteau terrestre et la surface, et la façon dont le magma évolue à travers ces systèmes, jouent un rôle fondamental dans la construction et l’évolution des édifices volcaniques. Cependant, du fait de l’inaccessibilité de la plupart des systèmes volcaniques actifs à l’imagerie haute résolution, la morphologie détaillée des réservoirs de magma les plus superficiels et la relation entre l’initiation de la remontée de magma et la dynamique des éruptions restent largement méconnues.

Topographie et tectonique du plancher océanique (à gauche) et morphologie 3D des lentilles magmatiques sous la surface (à droite) d’un segment de la dorsale Est-Pacifique (9°50′ N). © Marjanovic – CNRS – IPGP

Dans une étude publiée le 29 septembre dans la revue Science Advances, une équipe internationale impliquant des scientifiques du CNRS, de l’Institut de physique du globe de Paris et d’Université Paris Cité, présentent des images sismiques inédites, à haute résolution, qui éclairent l’architecture à petite échelle du réseau de corps magmatiques les moins profonds, situés sous une zone en éruption de la dorsale Est-Pacifique. Ces images, fruit d’une collaboration avec l’industrie géophysique ayant permis l’utilisation d’une technique d’imagerie de pointe, ont été obtenues par inversion des formes d’onde de données de sismique réflexion acquises lors de campagnes océanographiques en 2008.

L’étude révèle que ces lentilles, qui étaient jusqu’alors modélisées comme des corps lisses, présentent en réalité des crêtes et des creux qui sont interprétés comme des zones où prennent naissance les dikes (filons de magma qui remontent depuis le réservoir jusqu’à la surface). Cette morphologie particulière serait sculptée par les processus de recharge du magma depuis le manteau et d’extraction du magma vers la surface. La répétition de ces processus laissant une empreinte, liée à la concentration des contraintes induites par la topographie, qui contribue à la nucléation des dikes et au déclenchement de la remontée du magma vers la surface et plus largement à la dynamique des éruptions suivantes.

En incluant ces nouveaux résultats dans les modèles numériques tridimensionnels de dernière génération, il devrait désormais être possible d’obtenir une représentation plus réaliste des systèmes volcaniques qui contribuera à une meilleure localisation des éruptions, et ainsi à l’amélioration de l’évaluation des risques volcaniques.

 

Références :

> Insights into dike nucleation and eruption dynamics from high-resolution seismic imaging of magmatic system at the East Pacific Rise, Marjanović et al., Sci. Adv. 9, 2023.

DOI : 10.1126/sciadv.adi2698

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